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Ministère de l’Economie vs Autorité de la concurrence : 1-0 ?

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES

Paru dans La Lettre des Juristes d'Affaires n°1356 du 25 juin 2018

Le 14 juin dernier, l’Autorité de la concurrence a publié, à quelques heures d’intervalle, deux communiqués de presse sur le même dossier. Le premier annonçant l’autorisation de la reprise par Financière Cofigeo de certains actifs du groupe Agripole (William Saurin, Panzani, Garbit) sous réserve du respect d’injonctions de cession d’actifs. Le second pour prendre acte de la décision du ministre de l’Economie et des Finances de faire usage de son pouvoir d’évocation. Un pouvoir qui n’avait jamais été utilisé en France depuis sa mise en œuvre en 2008 et qui pourrait s’analyser comme un signal envoyé à l’Autorité de la concurrence pour tenir compte des problématiques d’emploi dans ses tests de marché. Jacques-Philippe Gunther, associé du cabinet Latham & Watkins, analyse le dossier.

Qu’est ce que le pouvoir d’évocation du ministre de l’Economie et des Finances ?

Il relève de l’article L. 430-7-1 du code de commerce que le ministre en charge de l’économie peut évoquer l’affaire portée devant l’Autorité de la concurrence, dans un délai de 25 jours ouvrés à compter de la notification de la décision administrative. Ce pouvoir repose sur des critères d’intérêt général autres que le maintien de la concurrence et « compensant l’atteinte portée à cette dernière par l’opération », comme le maintien de l’emploi et le développement industriel.

C’est finalement une sorte de phase 3 d’examen de l’opération, après les deux premières (enquête dite « simple » suivie d’une procédure approfondie) qui ont lieu devant l’Autorité de la concurrence. Ce pouvoir existe également dans d’autres pays comme en Allemagne (il a par exemple été utilisé dans le dossier d’acquisition par E. ON de Ruhrgas en 2002, dans lequel l’opération entre les deux principales entreprises énergétiques allemandes avait été interdite par le Bundeskartellamt puis autorisée par le ministre de l’Économie), au Royaume-Uni, aux Pays-Bas ou encore en Espagne. Il a été introduit dans le droit français par la loi du 4 août 2008, lors de la création de l’Autorité de la concurrence, mais n’avait jamais été utilisé. C’est donc une décision inédite que vient de prendre Bruno Le Maire.

S’explique-t-elle par une sévérité accrue de l’Autorité de la concurrence dans ce dossier ?

Je ne le crois pas. La décision de l’Autorité de la concurrence repose sur un schéma classique : l’opération créait un quasi-monopole sur les marchés de la fabrication de plats cuisinés exotiques et italiens avec une détention de parts de marché estimée entre 70 et 80 % et des marques fortes. L’acquéreur avait avancé la théorie de l’entreprise défaillante qui permet d’autoriser une opération de concentration lorsque la cible de l’opération est en proie à de graves difficultés économiques et que l’acquéreur se présente en quelque sorte comme l’acquéreur naturel. Mais l’argument a été écarté par l’Autorité au motif que d’autres groupes avaient présenté une offre de reprise de l’actif devant le tribunal de commerce de Paris ; la liquidation judiciaire n’était donc pas inéluctable. L’absence de tout engagement proposé par Cofigeo à l’issue de la phase 2, – ce que l’on peut admettre puisque l’opération avait été bouclée déjà depuis un an – ne peut se comprendre que si des assurances avaient été reçues par Cofigeo, bien en amont, de la part des services du ministre. L’Autorité a donc fait usage, pour la deuxième fois de son histoire en matière de concentration, de son pouvoir d’injonction : la cession de la marque Zapetti ainsi qu’un site de production à un acquéreur qui disposerait ainsi d’actifs permettant d’exercer une pression concurrentielle sur Cofigeo. Des exigences classiques en pareille situation. Il s’agit donc d’un geste fort du ministre, alors même que, à première vue, l’opération ne semblait pas si emblématique et que l’analyse de l’Autorité ne paraît pas particulièrement en dehors des clous.

Comment justifier l’intervention inédite du ministre ?

Il pourrait s’agir, selon moi, d’un signal envoyé à l’Autorité de la concurrence qui ne tient pas compte, dans ses principaux critères d’analyse, de considérations industrielles et de l’emploi. Même si , tout de même, l’Autorité a introduit fort habillement un critère « social » puisque que dans son communiqué elle souligne que l’injonction imposée visait à prévenir une hausse des prix qui aurait impacté principalement les ménages les plus modestes. Dans ce contexte, c’est donc une brèche importante qui vient d’être ouverte dans le dispositif français et qui pourrait avoir des conséquences sur d’autres secteurs à l’avenir. Les secteurs très concentrés pourraient-ils se mettre à rêver d’un dose de politique industrielle aux côtés d’une politique de concurrence qui, notamment au niveau européen est souvent décriée par ces acteurs pour sa rigidité ?

Comment anticipez-vous la suite du dossier ?

La décision du ministre sera connue autour du 9 juillet. Difficile d’imaginer qu’elle autorise purement et simplement l’acquisition, au regard des parts de marché détenues. Elle pourrait donc envisager d’autres remèdes à l’opération. On peut néanmoins anticiper que la décision du ministre sera attaquée devant le Conseil d’Etat par des concurrents ou des consommateurs. L’occasion pour la juridiction administrative de tracer la limite de ce contre-pouvoir du ministre. J’ajoute que l’annulation de cette décision poserait la question de savoir ce que deviendrait la décision d’injonction de l’Autorité. Serait elle annulée aussi ?

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