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Rôle et missions d’un chef de projet (1<sup>re</sup> partie)

Par Anne Girard – Seenago

« Chef de projet »… voilà un rôle qui, selon les cas, peut faire rêver ou susciter de grandes inquiétudes !

Et ce d’autant plus que l’expression est aujourd’hui très répandue et parfois utilisée à mauvais escient : on nomme quelqu’un chef de projet pour le valoriser sans lui donner les responsabilités et l’autonomie nécessaires, ce qui revient à essayer de faire croire à un exécutant qu’il n’en n’est pas un ! Autre exemple : certaines personnes se trouvent catapultées « chef de projet » sans même avoir une idée du projet en question ou que celui-ci ait réellement fait l’objet d’une décision. Il s’agit juste d’un effet d’affichage sans réelle volonté de passer à l’action. Enfin, être « chef de projet » consiste avant tout à s’occuper d’un projet, c’est-à-dire d’un ensemble de tâches à accomplir, dans une période de temps finie, pour arriver à un but. Lorsque tous les lundis, je classe mes emails de la semaine, je ne suis pas chef du projet « classement d’emails »… En revanche, si je m’attaque à la création d’un système de classement d’emails avec des procédures spécifiques applicables à tout le cabinet pour la fin de l’année, je peux effectivement dire que je suis chef du projet « création d’un système de classement des emails ».

Mais dans ce cas, quels seront mon rôle et mes missions ? Quelles compétences sont nécessaires pour les mener à bien ? Dois-je nécessairement être un expert des systèmes de messagerie électronique ? Selon la complexité des projets, le rôle de chef de projet peut devenir lui-même très complexe et très impliquant, en temps comme en énergie. C’est la raison pour laquelle la maîtrise d’une méthodologie de gestion de projets est indispensable, en particulier lorsque le nombre d’intervenants ou de contributeurs est élevé, lorsque les enjeux financiers ou stratégiques sont importants ou encore que le projet se déroule sur une longue durée (de plusieurs semaines à plusieurs années). Pour autant, ces seules compétences en organisation et en planification ne suffisent pas. Le « chef de projet » est un « chef d’orchestre » qui doit coordonner, motiver, guider les contributeurs au projet avec la même rigueur et la même sensibilité qu’un « maestro ». C’est la raison pour laquelle nous aborderons, dans deux fiches successives, les points importants à prendre en compte dans l’exercice du rôle de chef de projet.

Le chef de projet, pivot dans l’organisation d’un projet

Pour bien comprendre son rôle, le chef de projet doit être en mesure d’identifier le rôle des autres parties prenantes du projet : les sponsors, les membres de l’équipe-projet, les contributeurs.

Le « sponsor » (ou « donneur d’ordre ») – Il s’agit d’un individu ou d’un groupe d’individus qui a l’autorité finale sur le projet, notamment sur le plan budgétaire. Pour un projet informatique, le sponsor peut être l’associé en charge de l’informatique au cabinet ou bien le groupe des associés. Le chef de projet est en général désigné par le(s) sponsor(s). Ici, il pourra s’agir du responsable informatique ou du secrétaire général, par exemple. Le rôle du sponsor est essentiellement stratégique. Il n’intervient pas dans les aspects opérationnels du projet. Il est aussi celui qui apporte les principaux éléments du cahier des charges. Le chef de projet lui rend des comptes et l’informe de l’avancement du projet. Il ne se substitue pas au sponsor sur le plan de la prise de décision. En revanche, il a pour mission d’apporter les éléments d’information nécessaires aux sponsors pour prendre une décision.

L’équipe-projet – L’équipe projet est composée par le chef de projet en fonction de l’ampleur et de la nature du projet. Elle peut intégrer des sponsors mais surtout des contributeurs importants – par exemple, pour un projet de déménagement, l’équipe-projet sera notamment composée du responsable des services généraux, du responsable informatique… Pour les projets dont les budgets sont élevés, il est recommandé d’intégrer le responsable financier dont le rôle sera d’assister le chef de projet pour le suivi financier. Des ressources externes peuvent également faire partie de l’équipe projet : dans le cadre de l’organisation d’un événement client de grande ampleur, par exemple, les représentants de l’agence de communication événementielle seront incorporés à l’équipe-projet. En tant qu’animateur de l’équipe-projet, le chef de projet doit pouvoir compter sur les membres de celle-ci et composer l’équipe avec discernement et à la mesure de la taille et des enjeux du projet.

Les contributeurs – Les contributeurs sont toutes les personnes qui seront chargés d’une ou plusieurs tâches à réaliser au cours du projet. Si l’on reprend le cas de l’événement client, les assistantes auront peut-être une tâche de mise à jour des informations-clients dans la base de données avant l’envoi des invitations. Les collaborateurs, eux, auront peut-être pour mission d’accueillir certains clients lors de la soirée. En tant que contributeurs, les assistantes et les collaborateurs jouent un rôle important dans le projet et dans le dispositif. Cependant, ils ne font pas nécessairement partie de l’équipe-projet. Par ailleurs, les contributeurs ne sont pas nécessairement placés sous l’autorité hiérarchique du chef de projet. Celui-ci doit donc faire en sorte que les tâches à réaliser reçoivent le niveau de priorité nécessaire en temps voulu.

On constate en effet que l’une des principales causes des retards ou des problèmes de qualité d’exécution dans les projets est le conflit de priorité. Le contributeur n’a pas forcément les moyens d’arbitrer entre deux ou plusieurs tâches à réaliser dans un temps limité. C’est pourquoi le soutien du chef de projet sur l’organisation personnelle de chaque contributeur, la communication (et parfois la négociation !) avec leurs supérieurs hiérarchiques sont importants. Le chef de projet, doit avoir la légitimité nécessaire pour dialoguer avec ces derniers et trouver des solutions. Si les contributeurs internes ne peuvent, pour des raisons diverses, remplir la tâche qui leur a été confiée dans les délais, la capacité à être flexible dans le planning ou à mobiliser d’autres ressources pour faire avancer les choses sont des facteurs-clés de réussite. A titre d’illustration, si le chef de projet a l’autonomie suffisante pour faire appel à des ressources externes qui se substitueraient aux ressources internes, les problèmes de conflits de priorité pourront être gérés. On voit ici à quel point il est crucial pour le chef de projet de clarifier son niveau d’autonomie de décision et sa relation avec les sponsors. En effet, si le recours à des ressources externes s’avère la solution la plus pertinente compte tenu de la situation du projet, l’impact sur le budget devra être évalué et la décision éventuellement validée par les sponsors sur la base d’éléments financiers.

En conclusion de cette première fiche sur ce sujet, on peut dire que le rôle du chef de projet ne se comprend et ne se construit que dans le cadre de l’organisation mise en place autour du projet. S’il est important de respecter certains grands principes, et en particulier la clarté des rôles, les circuits de prise de décision et la définition des limites de l’autonomie, en pratique, chaque chef de projet, en fonction de la nature du projet et des spécificités de fonctionnement de la structure dans laquelle il exerce, devra construire son rôle tant dans la phase de préparation que dans la phase de réalisation du projet.