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Management et gestion des attentes

Par Anne Girard –  Seenago

Dans le cadre d’une relation de travail entre deux personnes (ou plus), la question des attentes et de leur compréhension est un paramètre fondamental qui conditionne le succès de la collaboration.
Trop souvent en effet, se créent des malentendus, qui dégénèrent en frustrations ou même en conflits, parce que les attentes n’ont pas été ajustées, communiquées et comprises.
Cette situation est particulièrement critique lors de recrutements ou de promotions internes. L’intégration d’un nouveau collaborateur, par exemple, est souvent considérée comme « allant de soi ». L’accent a souvent été mis sur le recrutement (sélection du candidat, négociation de la rémunération etc.) et une fois ce cap franchi, et le contrat signé, les efforts se relâchent. Or c’est particulièrement pendant les 6 premiers mois que l’attention doit se porter sur la clarification des attentes.

 

Il existe des attentes explicites (qui vont être formulées spontanément) et des attentes implicites (voire inconscientes). Ce sont bien souvent ces dernières qui vont poser problème : à l’analyse, on découvre que le collaborateur ne donne pas satisfaction sur un point mais en réalité, on découvre également qu’aucune attente n’a jamais été formulée sur ce point précis ; soit l’associé (ou le manager) n’a pas pris la peine de l’expliciter parce que « cela va de soi », soit parce qu’il n’avait lui-même même pas conscience de ce qu’il attendait précisément.
Il existe des attentes liées aux savoir-faire et aux compétences et d’autres liées aux savoir-être et aux comportements.
Dans le premier cas, les savoir-faire et les compétences peuvent être déduites des qualifications (diplômes etc.) et des expériences professionnelles antérieures. Une lecture attentive d’un CV permet de valider si le candidat est capable de répondre à certaines attentes.
Dans le second cas, les attentes sont souvent difficiles à clarifier car elles ne sont pas « formalisées » ou explicitées. Les entretiens de recrutement sont les seuls moments où les savoir-être peuvent apparaître et ne suffisent bien souvent pas.
A titre d’exemple, les nouveaux arrivants découvrent souvent par eux-mêmes qu’il est « mal vu » de ne pas assister aux événements conviviaux du cabinet ou de l’étude. C’est une attente implicite, qui n’a rien à voir avec un savoir-faire ou une compétence mais qui est reliée à la culture et aux valeurs de l’organisation, souvent portées par les dirigeants.
A l’inverse, des nouveaux arrivants peuvent se voir reprocher de ne pas décrocher le téléphone en soirée, lorsque la réceptionniste a terminé son service. Pourtant, cela peut être une attente forte de la part du manager ou de l’associé… il lui faudra alors l’expliciter.

Les malentendus peuvent également venir du fait qu’un nouvel arrivant projette les attentes qu’on avait à son égard dans son cabinet précédent, dans la situation actuelle. Il va donc réaliser des tâches ou avoir des comportements qui ne répondent à aucune attente préexistante au sein de la nouvelle structure. Ce faisant, il va créer un précédent et générer de nouvelles attentes. Si, pour une raison ou pour une autre, il n’y répond plus, une insatisfaction risque de se créer.
Prenons le cas hypothétique (et quelque peu caricatural !) d’un collaborateur nouvellement arrivé qui, spontanément, apporte un café à son associé tous les matins, comme il avait l’habitude de le faire dans son environnement de travail précédent.
L’associé, lui, n’a rien demandé mais trouve cela très agréable. Tellement agréable que ce comportement devient valorisé au sein de la structure et devient une attente généralisée : tous les collaborateurs doivent apporter un café tous les matins à leur associé ! On voit bien comment émergent certaines attentes et comment on peut également créer une frustration si celles-ci ne sont plus remplies par la suite…
Nous avons tous tendance à projeter nos propres attentes et à penser que les autres fonctionnent comme nous. Pour cela, nous devançons souvent leurs « désirs », en application du précepte « fais aux autres ce que tu aimerais qu’on te fasse à toi ». Malheureusement, cette approche n’est pas toujours couronnée de succès car nous sommes tous différents. Ainsi, l’associé ou le manager à qui on apporte son café tous les matins préfèrerait peut-être qu’on lui apporte le journal ou une revue de presse… Il peut penser par ailleurs, que le temps passé par le collaborateur à préparer et apporter le café pourrait être utilement occupé à faire autre chose.
Ce constat amène à poser le principe de l’expression des attentes. Poser la question « qu’est-ce que vous attendez de moi ? » amène souvent à des découvertes intéressantes et peut éviter des malentendus ou des déceptions.
D’un point de vue managérial, exprimer ses attentes envers un collaborateur est un acte indispensable qui maximise la probabilité que chacun soit satisfait de la collaboration. Cela suppose une réflexion en amont et, également de faire le point régulièrement pour tirer des expériences les enseignements nécessaires.