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Sollicitation personnalisée : que dit la loi ?

Par Sabrina Tantin, Consultante Communication & Marketing, Juricommunication

Dans un contexte de concurrence exacerbé, les cabinets d’avocats ont évolué vers une organisation semblable à une PME, avec une nécessité de développement et de rentabilité. Quand le cabinet devient une entreprise, il doit alors s’équiper des outils adéquats. Et le décret n°2014-1251 du 28 octobre 2014, autorisant le démarchage pour les avocats, est une opportunité supplémentaire au profit de leur développement. Il permet ainsi aux cabinets d’avocats de mieux s’équiper pour faire face à leurs concurrents européens ou internationaux.

I- Rappel des textes* relatifs à l’autorisation de démarchage

L’autorisation de démarchage et l’autorisation de la communication et du marketing dans le développement des cabinets sont néanmoins récentes, comparativement aux professions non-réglementées et non-libérales. En 1971, la loi du 31 décembre, dans son article 66-4, interdisait aux avocats toute action de démarchage et prévoyait une amende de 4 500 euros et 6 mois de prison. La communication et le marketing étaient alors tabous pour les avocats. Depuis, le Conseil national des barreaux (CNB) a dédié l’article 10 du Règlement intérieur national (RIN) à la communication. L’éventail des actions de communication et de marketing réalisables par et pour les avocats a été ainsi considérablement élargi.
En 2011, la Cour de justice de l’Union européenne a condamné toute interdiction totale de démarchage pour les professions réglementées. Cette décision de justice impose, en effet, la suppression de l’interdiction totale des communications commerciales des professions réglementées, hormis pour les notaires, huissiers de justice et professions de santé qui n’entrent pas dans le champ de la directive Services (CJUE, 5 avr. 2011, aff. C-119/09, Sté fiduciaire nationale d’expertise comptable c/min. Budget, Comptes publics et Fonction publique). Selon la CJUE, « interdire tout acte de démarchage, c’est priver les professionnels provenant d’autres États membres d’un moyen efficace de pénétration du marché en cause, et donc restreindre la libre prestation des services transfrontaliers ». L’article 13 de la loi Consommation du 17 mars 2014 met fin à l’interdiction du démarchage pour les avocats. Et le décret n°2014-1251 du 28 octobre 2014 relatif aux modes de communication des avocats détermine les règles de déontologie de la profession d'avocat ainsi que les conditions dans lesquelles les avocats sont autorisés à recourir à la sollicitation personnalisée.
Aujourd’hui, il existe un large éventail d’outils de communication, de marketing et de business development pour faire face à une nouvelle concurrence. Cet arrêt est une opportunité et non une menace.

II - Que signifie concrètement cette autorisation à recourir à la sollicitation personnalisée ?

Le décret n° 2014-1251 du 28 octobre 2014 relatif aux modes de communication des avocats  détermine les règles de déontologie de la profession d'avocat, les conditions dans lesquelles les avocats sont autorisés à recourir à la sollicitation personnalisée.

Cette sollicitation personnalisée prend désormais la forme :
-  d'un envoi postal ou ;
- d'un courrier électronique adressé au destinataire de l'offre de service (à l'exclusion de tout message textuel envoyé sur un terminal téléphonique mobile).

Cette sollicitation précise les modalités de détermination du coût de la prestation, laquelle fera l'objet d'une convention d'honoraires.
Elle ne peut être réalisée ni par un avocat ni par un prestataire ou partenaire du cabinet. Les peines prévues s’appliquent désormais à toute personne qui, n'étant pas avocat, se livre à un acte de démarchage en vue de donner des consultations ou de rédiger des actes en matière juridique.

Il faut rappeler que la publicité et la sollicitation personnalisée sont permises à l'avocat si elles procurent une information sincère sur la nature des prestations de services proposées et si leur mise en œuvre respecte les principes essentiels de la profession. Elles excluent tout élément comparatif, superlatif ou dénigrant...

III - Des ouvertures nécessaires et positives mais qui doivent évoluer


Cette autorisation de démarchage est une avancée pour cette profession mais elle reste incomplète du fait de la concurrence et des évolutions des marchés. Plusieurs rapports relatifs aux évolutions des professions réglementées et libérales ont été commandés par différents gouvernements (Attali, Darrois...). Le dernier en date est le rapport Ferrand, qui a été remis début novembre 2014 au ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, et à la ministre de la Justice, Christiane Taubira. Ce rapport émet 28 propositions visant à réformer les professions réglementées, et souhaite des "réglages fins et exigeants plutôt que des mesures brutales".
Parmi elles, les plus significatives pour les cabinets d'avocats en matière de marketing et de communication sont les propositions 15 à 17, dont celle qui vise à assurer la transparence des tarifs pratiqués.

 



* (L. 31 décembre 1971, art. 3 bis et 66-4 ; D. 25 août 1972 ; D. 12 juillet 2005, art. 15)
Modifié par DCN n°2010-002, AG du CNB du 08-05-2010, Publiée au JO par Décision du 20-05-2010 - JO 11 juin 2010 | Titre et dispositions modifiés par DCN n°2014-001, AG du CNB du 10-10-2014.