Trois questions à Sophie Vermeille et Cyril Deniaud, présidente et membre de Droit & Croissance
Cette interview est parue dans son intégralité dans la LJA 1201 (réservé aux abonnés)
Trois ans après sa création, où en est Droit & Croissance ?
Sophie Vermeille : Le think tank a grandi, notamment en notoriété. Nous comptons environ 55 jeunes praticiens et jeunes chercheurs, et nous avons le soutien de cabinets comme Bredin Prat, Davis Polk, JeantetAssociés et Jones Day. Des professeurs de renom ont rejoint notre comité d’orientation (voir encadré, NDLR), et notre comité de direction a accueilli des personnalités comme Laurence Parisot ou Gilles de Margerie, ce qui prouve que nous commençons à toucher des élites se situant en dehors de la sphère du droit. Au niveau de nos recherches, nous nous sommes beaucoup investis dans le droit des faillites, ce qui nous a donné une visibilité auprès des pouvoirs publics, notamment l’Elysée et Bercy, et des cercles étrangers. Nous avons ainsi participé à des conférences à la Banque Mondiale, au FMI, à Oxford, à Francfort, à Florence, et nous serons prochainement à Rome et à Bruxelles. Droit & Croissance est désormais perçu à l’étranger comme l’un des interlocuteurs français principaux sur les sujets droit et économie.
Vous vous êtes montrée très critique sur l’article 70 du projet de loi Macron permettant l’éviction des actionnaires majoritaires (LJA 1195 - réservé aux abonnés). Pourquoi ?
S.V. : Nous avons été consultés sur ce projet de réforme. Nous sommes ravis que notre proposition principale, la dissociation du sort de l’actionnaire de celui de l’entreprise en procédure collective, ait été retenue. Cependant, notre avis n’a pas été pris – encore – en compte totalement. Nous soulevons le risque d’une censure constitutionnelle pour atteinte au droit de propriété des actionnaires. En effet, le projet de loi ne prend pas en compte la valeur de l’entreprise comme critère déterminant des conditions de la restructuration. Cet épisode montre que D&C ne défend ni les actionnaires, ni les créanciers en particulier, mais l’idée que le droit doit être plus efficace.
Le 9 avril prochain, vous organisez une conférence sur l’attractivité de la place de Paris à travers le prisme du droit boursier. Pourquoi ce thème ?
Cyril Deniaud : Cette conférence, la première organisée par Droit & Croissance sur un thème autre que le droit des faillites, s’inscrit dans la continuité de plusieurs articles que nous avons rédigés l’année dernière sur la loi « Florange », notamment pour s’interroger sur la pertinence de l’attribution automatique de droits de vote double comme moyen de lutte contre le court-termisme des actionnaires des sociétés cotées. Co-organisée avec le CEDE (ESSEC) et CAPITALCOM, avec le soutien de JeantetAssociés, de Bredin Prat et de l’Institut Louis Bachelier, cette conférence traitera de trois thèmes : (i) l’impact de la récente réforme du régime des OPA sur l’attractivité de la place de Paris, en l’analysant notamment du point de vue du droit comparé ; (ii) l’intérêt pour une entreprise de s’introduire en Bourse aujourd’hui, malgré les obligations auxquelles sont soumises les sociétés cotées et en dépit de certains blocages qui peuvent restreindre la fluidité pour entrer ou sortir de la cote ; et (iii) l’attractivité de l’investissement en Bourse pour des actionnaires individuels, ce sujet étant d’autant plus essentiel que c’est souvent l’investissement direct (c’est-à-dire désintermédié) qui permet de porter les projets les plus innovants. La conférence sera introduite par Michel Prada, président du Haut comité juridique de la place financière de Paris, et sera conclue par Marc Lefèvre d’Euronext.
Propos recueillis par L.G.