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ZAN : le defi de demain

Par Par Romain Canot, associe, cabinet Oyat

La loi Climat et Résilience impose de repenser l’aménagement du bâti et des infrastructures, afin de les concilier avec la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf). L’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN) représente un tournant majeur de la planification territoriale durable au nom de l’impératif de sobriété foncière. Décryptage d’une notion à fort impact pour les professionnels de l’immobilier, de la RSE et les acteurs des territoires.

La loi Climat et Résilience fixe l’objectif ambitieux du « zéro artificialisation nette » des sols à l’horizon long terme 2050, avec un objectif à moyen terme de réduction de 50 % de la trajectoire de consommation totale d’espaces à l’horizon 2031. La notion d’artificialisation est définie par cette loi comme « une altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sols […] ». Il s’agit donc d’instaurer des leviers concrets pour lutter contre le processus d’étalement urbain, d’imperméabilisation des sols et de transformation des Enaf en espaces artificialisés. Afin de répondre à l’impératif de sobriété foncière, l’objectif ZAN peut être compris par référence à la séquence « éviter, réduire, compenser » (ERC), qui est au coeur de la démarche d’intégration des enjeux environnementaux au sein des projets immobiliers. Il s’agit, ici, d’éviter la construction de nouvelles surfaces de plancher ou, à tout le moins, de recycler le foncier déjà artificialisé (friches), réduire l’impact d’une construction en favorisant la densification des surfaces déjà artificialisées (la ville sur la ville, revitalisation des centres-bourgs en zone rurale) et compenser l’artificialisation résiduelle par une renaturation des espaces naturels à l’échelle d’une opération.

Concrètement, la réduction de l’artificialisation nette est évaluée, selon le législateur, par le solde de l’artificialisation et de la renaturation des sols constatées sur un périmètre et une période donnée. Afin de mettre en oeuvre ce processus de désartificialisation, le gouvernement s’appuie principalement sur les documents de planification régionaux et les documents d’urbanisme (PLU / PLUI) qui sont des leviers stratégiques pour matérialiser l’objectif ZAN. À cet égard, deux décrets d’application ont été publiés le 30 avril dernier qui fixent, d’une part, les objectifs et règles en matière de gestion économe de l’espace à mettre en place dans les documents de planification urbaine et, d’autre part, une nomenclature des surfaces artificialisées et non-artificialisées. L’ensemble des acteurs du secteur de la construction, aménagement et de la promotion sont affectés : les acteurs publics doivent réviser les documents d’urbanisme pour intégrer l’objectif du ZAN conformément à un échéancier ambitieux (horizon 2027 pour les PLU).

À défaut, les sanctions sont particulièrement dissuasives, puisqu’aucune autorisation d’urbanisme ne sera délivrée dans les zones urbanisables ou à urbaniser dont le document d’urbanisme n’a pas opéré ces modifications ; les projets mis en oeuvre par les aménageurs et promoteurs seront affectés par cette nouvelle donne, qui est susceptible d’engendrer une baisse de l’offre foncière disponible dans un contexte de pénurie de logements et de complexifier la réalisation concrète des projets d’aménagements, compte tenu d’une déclinaison des objectifs de manière différenciée et territorialisée. Alerté par certaines collectivités réclamant un report de calendrier, le Sénat a lancé une consultation publique jusqu’au 27 juin, afin d’identifier et de résoudre les difficultés opérationnelles nombreuses relatives à la mise en oeuvre concrète de l’objectif ZAN, prévu par la loi Climat et Résilience. Le chemin critique vers l’objectif « zéro artificialisation nette » sera assurément long et non sans embûches et questionnements multiples pour l’ensemble des acteurs public et privés de la filière.