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Réforme du droit des sûretés : focus sur le cautionnement et les sûretés réelles mobilières

Par Laure Bonin, associée, et Emmanuel Le Galloc'h, avocat, cabinet August Debouzy

Longtemps attendue, l’ordonnance n°2021-1192 portant réforme du droit des sûretés a été publiée le 15 septembre 2021. Elle entrera en vigueur le 1er janvier 20221.

Nous nous consacrerons ici aux principales modifications concernant le cautionnement et les sûretés réelles mobilières.

Signature électronique : La signature de l’ensemble des sûretés par voie électronique est entérinée. C’était une nécessité vu l’accélération de ce mode de signature pendant la crise du Covid-19.

Rangs des sûretés : Usitée par les praticiens s’agissant des sûretés inscrites, la constitution de rangs successifs pour les nantissements de créances est désormais reconnue.

Cautionnement : Le régime du cautionnement a été intégralement refondu. Dans un souci de sécurité juridique, toutes les dispositions du Code de la consommation, du Code monétaire et financier et du Code civil sont réunies dans le Code civil. La mention manuscrite devant être apposée par la caution personne physique n’a plus à suivre un modèle précis2, mais reste une condition de validité et ce quelle que soit désormais la qualité du créancier (professionnel ou non).

Création jurisprudentielle, le devoir de mise en garde de la caution personne physique par le créancier professionnel sur le caractère inadapté de l’engagement du débiteur principal par rapport à ses capacités financières fait son entrée dans le Code civil.  En cas de non-respect, la sanction sera la déchéance du droit du créancier (et non plus la mise en jeu de la responsabilité de celui-ci) à hauteur du préjudice subi par la caution. Le non-respect du devoir de mise en garde quant au caractère disproportionné de l’engagement de la caution par rapport à ces revenus est lui, sanctionné par la réduction du cautionnement au montant auquel la caution pouvait s’engager (et non plus la déchéance totale).

L’obligation d’information des cautions personnes physiques est étendue aux personnes morales lorsque le créancier est un établissement de crédit ou une société de financement. La caution peut désormais opposer au créancier les exceptions personnelles appartenant au débiteur (en plus des exceptions inhérentes à la dette) et le cautionnement d’obligations futures est également créé.

Sûreté réelle pour autrui : La réforme donne une base légale au cautionnement réel, rappelle que le créancier n’a de recours que sur le bien affecté en garantie et étend l’application de certaines règles protectrices en matière de cautionnement (devoir de mise en garde, obligation d’information, bénéfice de discussion, etc.)3 au constituant.

Cession de créances à titre de garantie : La réforme introduit la cession de créance à titre de garantie de droit commun. Au même titre que la cession Dailly, elle entraîne un véritable transfert de la propriété de la créance mais son formalisme est moins lourd.

Gage-espèces : la réforme consacre la cession de somme d’argent à titre de garantie.

Les objectifs de simplification, clarification et efficacité de la réforme sont également atteints avec la suppression de sûretés devenues obsolètes, la précision quant au fait que le gage peut porter sur des biens immobilisés par destination, la fin de l’inscription du nantissement fonds de commerce à titre de validité ou la reconnaissance de la possibilité d’exclure les fruits et produits de l’assiette du nantissement de compte titres.

Notes : 

1. Pour le nantissement de fonds de commerce et le nouveau régime du gage automobile il faudra attendre une date qui sera fixée par décret et qui ne pourra être postérieure au 1er janvier 2023. Les dispositions protectrices des articles 2302 à 2304 nouveaux seront applicables y compris aux cautionnements et aux sûretés réelles pour autrui constitués antérieurement au 1er janvier 2022.

2. Ex article L. 331-1 du Code de la consommation.

3. Les dispositions des articles 2299, 2302 à 2305-1, 2308 à 2312 et 2314 sont applicables à la caution réelle.