Quel statut pour les avocats étrangers dans les cabinets internationaux à Paris ?
Les bureaux parisiens des cabinets internationaux sont fréquemment confrontés au besoin de renforcer leurs équipes avec des avocats en provenance d’autres bureaux de la firme. Or, un avocat, d’où qu’il vienne, doit disposer d’un statut pour pouvoir exercer en France, même lorsqu’il ne conseille pas en droit français.
Une préoccupation récurrente pour les cabinets internationaux
Les cabinets internationaux doivent concilier la réglementation professionnelle locale des pays dans lesquels ils sont installés avec une certaine mobilité de leurs effectifs. Si l’exercice du métier d’avocat reste très attaché au pays dans lequel l’avocat est qualifié, les situations dans lesquelles les avocats s’expatrient sont fréquentes. Installation d’un nouveau bureau, demandes spécifiques de clients, raisons personnelles ou familiales, parcours professionnels au sein de la firme sont autant d’exemples.
Les cabinets concernés ont le réflexe de se poser les questions fiscales et sociales qui vont avec ces mouvements d’avocats mais la réglementation professionnelle est mal connue et parfois ignorée.
Les règles applicables et le contrôle ordinal répondent à deux objectifs principaux : déterminer et contrôler les conditions d’exercice des avocats et réguler l’exercice du droit. On ne peut donc pas « faire du droit » sans un statut qui l’autorise. Le simple fait d’être un avocat admis à un barreau autre qu’un barreau français ne remplit pas cette condition. Les cabinets concernés doivent donc veiller à ce que les avocats étrangers rattachés à leurs bureaux parisiens disposent d’un statut adapté à leur situation.
Examinons ici les possibilités offertes par les textes, en mettant de côté l’option coûteuse consistant à proposer à l’avocat étranger un contrat de juriste salarié au sein du cabinet.
Le « stagiaire article 84 »
Malgré le terme de « stagiaire », ce statut prévu par l’article 84 du décret du 27 novembre 1991 est utilisé autant par les associés que par les collaborateurs. La convention de stage est conclue pour une durée d’une année renouvelable deux fois. L’activité du stagiaire est exercée sous le contrôle d’un maître de stage qui doit être un avocat inscrit au Barreau de Paris. Le stagiaire ne peut en aucun cas se substituer au maître de stage dans l’exercice de la profession.
Même si le texte ne mentionne pas cet aspect, le Barreau de Paris considère que l’esprit de l’article 84 est de donner à l’avocat étranger le temps de préparer l’examen d’admission au Barreau. Il est donc conseillé au stagiaire de l’article 84 de s’inscrire à l’examen s’il veut assurer le renouvellement de son stage après la première ou la deuxième année.
Ce statut de stagiaire n’est pas incompatible avec la perception de revenus d’associé.
L’avocat communautaire
L’avocat communautaire est un statut bien connu permettant à un avocat, ressortissant communautaire et avocat admis dans un pays de l’UE de s’inscrire dans un barreau français pour y exercer sous son titre d’origine. Précisons que le Barreau de Paris étudie avec beaucoup de circonspection les demandes d’inscription en France de solicitors anglais (ayant une double nationalité communautaire) qui sont également inscrits en Irlande. L’Ordre semble y voir un phénomène de « pavillon de complaisance » qui a engendré quelques recours contentieux de la part de ces avocats.
Ces difficultés résultent notamment de divergences de vue sur les conditions d’exercice qui ne sont pas les mêmes en Irlande qu’en France. Cette voie reste cependant une option.
Le consultant juridique étranger
Le consultant juridique étranger (CJE) a été créé par l’ordonnance du 27 avril 2018. Le CJE est un avocat non-communautaire autorisé à exercer en France et à fournir des prestations juridiques dans le droit de son pays d’origine ou en « droit international ».
Pour être éligible à ce statut, il faut être avocat dans un pays qui a signé un traité avec la France autorisant les CJE. C’est incontestablement grâce au Brexit que le statut de CJE a acquis sa notoriété. Par le traité du 24 décembre 2020 signé entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, le CJE est devenu une option pour les solicitors qui avaient perdu leur qualité communautaire
Le statut de CJE n’est pas réservé aux seuls anglais. Les Japonais, les Chiliens et les Coréens sont parmi les avocats éligibles mais pas les Américains.
Les démarches auprès des instances professionnelles s’effectuent en deux temps. Une demande initiale doit être présentée au CNB qui valide l’admissibilité du candidat. Cette étape franchie, le futur CJE choisit un barreau d’inscription auquel il présente son dossier. Après examen des pièces et un rendez-vous avec un rapporteur, le CJE prête serment.
… sinon, il reste à passer l’examen
Le bon choix devra tenir compte du rôle de l’avocat étranger dans le cabinet, de la durée prévisible de son séjour en France ainsi que d’éventuelles considérations financières, fiscales et personnelles. À défaut, il devra se plonger dans les livres pour réussir l’examen. T