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La clause d’arbitrage à l’heure du règlement CCI 2017

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES
Paru dans La Lettre des Juristes d'Affaires: N° 1293 du 13/03/2017. Par Philippe Sarrailhé, associé, Foley Hoag
Victime de son indéniable succès alimentant paradoxalement les critiques croissantes dont il est l’objet, l’arbitrage commercial international abandonne progressivement sa nature informelle, qui en fut l’un des atouts. Symptôme de cette évolution, les règlements d’arbitrage institutionnels n’ont cessé au fil des années de prendre du volume, de précisions en dispositions nouvelles, destinées à promouvoir des gains d’efficacité, économie et rapidité.

Du même coup, la clause d’arbitrage, acte fondateur s’il en est – dont une abondante littérature théorique et pratique a depuis longtemps souligné l’importance et les pièges – requiert désormais une attention encore accrue en exigeant des choix significatifs lors de sa rédaction.
On en voudra pour illustration le règlement d’arbitrage de la CCI – déjà modifié en 2012 puis de nouveau amendé en 2017 – applicable aux conventions postérieures au 1er mars 2017. En effet, sans revenir ici sur les conditions essentielles de validité de la clause compromissoire, ce ne sont pas moins de trois questions procédurales que le rédacteur attentif est invité à se poser au regard des dispositions du règlement : médiation, arbitre d’urgence et procédure accélérée.
Médiation. Quel dispositif aménager pour la médiation dans la clause de règlement des différends ? Silence et donc totale liberté d’en décider ultérieurement, engagement d’en discuter l’opportunité, le contentieux venu, ou véritable obligation de médiation préalable à l’arbitrage ? Autant d’options qui s’accompagnent de variantes rédactionnelles, sans compter celles qu’induit la deuxième question ci-après.

L’arbitrage commercial international abandonne progressivement sa nature informelle


Arbitre d’urgence. Veut-on exclure le recours éventuel à l’arbitre d’urgence prévu par le règlement ? Dans ce cas, il conviendra de le stipuler précisément, à défaut de quoi les dispositions y relatives s’appliqueront.
Mais, si l’on valide par défaut le principe de l’arbitrage d’urgence et que l’on choisit par ailleurs de rendre obligatoire une médiation préalable, entend-t-on, le cas échéant, que des procédures de médiation et d’arbitrage d’urgence puissent se dérouler simultanément ? Situation potentiellement inopportune que l’on peut préférer écarter, ce qu’il faudra alors expliciter, quitte à moduler l’interdiction dans le temps en fonction du délai impératif de médiation préalable qui aura été convenu.
Procédure accélérée. Quel sort réserver à la procédure accélérée, apport le plus récent au règlement ? S’imposant lorsque le montant en jeu n’excède pas 2 millions USD, bénéficiant d’un calendrier resserré et d’un barème plus avantageux, elle entraîne néanmoins, nonobstant toute clause contraire, la désignation ipso facto d’un arbitre unique dont, en pratique, le choix échappera le plus souvent aux parties. Si les parties n’y ont pas convenance, elles devront spécifiquement exclure ce mécanisme de la clause compromissoire.
Autant d’éléments qui, loin d’alléger la tâche du rédacteur, pèseront d’autant plus sur lui qu’il ne pourra pas aisément s’affranchir de l’accord des parties dans l’exercice des choix en cause.
arbitrage