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White Collar Defense & Investigations, le pari réussi de Skadden Arps

Par Laura Dray

Le bureau parisien de Skadden Arps a marqué les esprits en début d’année en annonçant le renforcement de son équipe White Collar Defense & Investisations grâce à l’arrivée d’Emmanuel Marsigny, de Louis Guesdon et de leur équipe. Quelques mois plus tard, Margot Sève a été cooptée au rang d’associée du pôle. De quoi proposer une offre efficace et rare mêlant défense pénale, enquêtes internationales et compliance.

Le bureau parisien de Skadden a longtemps été dominé par une équipe unique mêlant la pratique du M&A et du boursier avec celle des enquêtes internationales, sous la houlette du charismatique managing partner de l’époque, Pierre Servan-Schreiber. Le départ, en 2015, de l’associé a conduit le bureau à redessiner sa pratique contentieuse.

Margot Sève, entrée chez Skadden en 2013, a contribué dès ses prémices à l’émergence du pôle White Collar Defense à Paris. « À l’origine, j’avais été recrutée pour faire du corporate/regulatory », glisse-t-elle sans surprise. Dès son arrivée, l’actualité et les besoins des clients amènent la docteure en droit de la régulation vers les premières grandes enquêtes internationales en matière d’infractions financières. Le renforcement des autorités administratives indépendantes, la généralisation des enquêtes internes sous l’impulsion des autorités américaines, l’internationalisation des contentieux (corruption, sanctions économiques, blanchiment, manipulation de marché…) imposent de nouvelles exigences : multidisciplinarité, capacité à dialoguer avec des autorités multiples, gestion de la communication de crise, analyse et anticipation des risques et prévention des défaillances. Le tournant décisif vient en 2016 avec la loi Sapin II, qui crée l’Agence française anticorruption (AFA) et institue la compliance obligatoire pour certaines entreprises. Mais surtout, elle introduit la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) qui redessine le droit pénal du pays, emboitant le pas aux Etats-Unis et aux procédures sur lesquelles Skadden construit son expertise.

Face à l’émergence de l’internationalisation du droit et des pratiques pénales, Skadden Arps s’engage alors dans la structuration d’une équipe pan-européenne senior capable de faire face à des procédures transfrontalières, alliant expertise contentieuse et vision stratégique. Une approche pionnière sur le marché français à l’époque. « Très vite, j’ai été impliquée sur des dossiers à forte dimension internationale, notamment pour des grandes banques françaises confrontées au DoJ et autres autorités américaines et non américaines en matière de sanctions et embargos, se souvient Margot Sève. Ensuite, sont arrivés d’autres dossiers majeurs en matière de corruption, de blanchiment, de manipulation de marché, de droit de la concurrence – des sujets alors particulièrement dans l’air du temps, largement portés par la pression des autorités américaines. Ce sont des enquêtes complexes et sur lesquelles se greffent souvent d’autres autorités nationales ou internationales. Ces dossiers ont positionné très tôt notre cabinet sur les résolutions internationales coordonnées, avec une équipe chevronnée capable de gérer toutes les phases d’une enquête, de la manifestation de la vérité à la négociation avec les autorités ».

Durant plusieurs années, le cabinet Skadden accompagne ses clients sur des sujets sensibles en matière d’enquêtes : corruption, sanctions économiques, blanchiment, antitrust, fraude comptable ; mais aussi mise en place ou renforcement de programmes de conformité, ainsi que gestion des procédures d’alerte. Mais pour proposer une offre cohérente, à la croisée du préventif, du réglementaire et du répressif, en phase avec l’évolution du paysage juridique, il manque un profil d’associé rompu aux arcanes du palais de justice. « Nous avons ressenti le besoin de nous renforcer sur l’aspect pénal afin de pouvoir interagir efficacement avec toutes les autorités concernées, y compris françaises », précise Margot Sève. Armand Grumberg, managing partner du bureau parisien depuis 2015, se met donc en quête de la perle rare.

L’ambition d’un cadre international

Au retour de l’été 2024, l’arrivée d’Emmanuel Marsigny comme associé pénaliste est annoncée dans les pages de la LJA. Suivi d’une partie de son équipe, il intègre la firme américaine durant les premiers jours de l’année 2025. Un événement marquant pour le marché. Fort de 30 ans d’expérience, cofondateur du cabinet Metzner puis de Marsigny Gosset, ce dernier rejoint pour la première fois une firme internationale. Il est accompagné de Louis Guesdon, son associé depuis 2016, arrivé chez Skadden en tant que counsel. Figure incontournable du pénal des affaires, Emmanuel Marsigny incarne la défense pénale « classique » : il plaide, connaît parfaitement les juridictions, est respecté des magistrats.

Au sein des bureaux spacieux et lumineux de la firme, sur fond de mur doré, le pénaliste rayonne. D’une voix grave et rassurante, il s’exprime calmement, posément, en prenant le temps de bien choisir ses mots. Après trente ans de barreau, il explique les raisons qui l’ont conforté dans son choix de rejoindre Skadden : « La politique répressive actuelle requiert, pour certains dossiers, de mobiliser des compétences transnationales. Les autorités répressives voient grand. On assiste à une pénalisation accrue du droit de la concurrence, de fraude fiscale en bande organisée… Ce sont des problématiques systémiques. Face à l’évolution du droit et de la pratique, il nous fallait une plateforme mondiale comme celle de Skadden pour pouvoir les appréhender efficacement ». Sa réponse se veut sincère, authentique et vraie. Un virage réfléchi et nourri par l’évolution du droit pénal pour cet avocat qui a longtemps prôné son indépendance.

Mais il explique que c’est la capacité unique de Skadden de croiser compliance, contentieux, et stratégie pénale qui l’a séduit. « Les enquêtes internes, la compliance et le droit pénal des affaires m’apparaissent être, pour de plus en plus de dossiers, une complémentarité tout à fait évidente. La délinquance en col blanc est désormais traitée comme celle du crime organisé », poursuit l’associé.

Force est en effet de constater que les deals de justice impliquent de plus en plus de juridictions avec plusieurs lois applicables, ainsi que la compétence de plusieurs autorités de poursuite. Dès lors, les deux associés en sont convaincus : seules les firmes internationales sont en mesure de mobiliser des équipes aux compétences transnationales pour défendre efficacement les grands groupes. Or l’équipe de Skadden s’appuie sur un réseau international intégré, permettant de travailler efficacement et en étroite collaboration avec les bureaux de Londres ou encore de New York. Cette expertise internationale permet aux associés de gérer des dossiers sensibles et de place pour des clients français dans des juridictions internationales en leur offrant une palette complète dans l’accompagnement, à toute heure du jour et de la nuit. « La firme Skadden Arps m’est apparu comme étant le cabinet le plus adapté à l’évolution du marché, et avec des compétences tout à fait remarquables », insiste Emmanuel Marsigny.

L’ancrage franco-français
comme valeur ajoutée

Dans ce nouveau paysage mondial, le positionnement de Louis Guesdon et d’Emmanuel Marsigny complète donc l’équipe préexistante avec une expertise pointue de la procédure pénale française. « Notre arrivée a permis de faire le lien entre les dossiers systémiques du cabinet et le droit pénal local, raconte Louis Guesdon. Nous apportons la connaissance fine de la chaîne pénale française : garde à vue, parquet, PNF, chambre correctionnelle… Cette expérience nous permet d’anticiper, de décoder les signaux faibles envoyés par les magistrats ». Une approche indispensable dans un système où l’enquête préliminaire, sans contradictoire, devient le cœur des procédures.

Tous insistent d’ailleurs sur la culture de la défense, essentielle dans un environnement où les conventions judiciaires ne doivent pas faire oublier le rôle du juge. « Même si la justice pénale privilégie l’approche transactionnelle, elle nécessite une vraie culture de la défense », insiste avec conviction Louis Guesdon. Une exigence d’autant plus forte que les poursuites ciblent de plus en plus souvent les personnes physiques, notamment les dirigeants, même lorsque la personne morale signe une CJIP. Pour lui, leur devoir repose aussi sur le fait de ne pas engager leurs clients dans des réflexions inutiles et de dessiner une stratégie sans trembler. « L’angle d’attaque du ministère public en France reste aujourd’hui les personnes physiques avec un effet de levier très important par les pouvoirs dont il dispose dans le cadre des enquêtes préliminaires et principalement des saisies ».

Ces trois fortes personnalités désormais réunies au sein d’une équipe d’une dizaine d’avocats abordent leur spécialité autour d’une même conception de la justice : exigeante, stratégique, humaine. Une approche intégrée qui permet aussi de mieux défendre les clients, tout en maîtrisant les risques. « L’équipe white collar de Skadden est à l’image de deux jambes musclées d’un même corps : la compliance d’un côté, la défense de l’autre. Cela permet de courir plus vite, plus loin, en étant plus fort », conclut Emmanuel Marsigny dans un sourire discret.