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« Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin »

Par Aurélia Granel

Stéphane Brabant et Lucien Bou Chaaya, qui viennent de quitter Herbert Smith Freehills pour rejoindre le cabinet Trinity International, dédié aux projets d’énergie et d’infrastructures en Afrique et dans les autres pays émergents, exercent ensemble depuis huit ans. Intervenant en particulier en Afrique, en structuration, suivi de projets et leurs financements, ainsi que pour les transactions corporate, essentiellement dans les secteurs minier et pétrolier, tous deux souhaitent poursuivre leur duo le plus longtemps possible.

Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Lucien Bou Chaaya : J’ai rejoint le cabinet Herbert Smith Freehills en juillet 2013, après une première expérience dans un cabinet libanais. Ayant été recruté par un autre associé de la firme, je me suis retrouvé à traiter, par concours de circonstances, une question pour un client de Stéphane, au mois d’août. Nous avons appris à nous connaître sur ce dossier et sommes devenus les interlocuteurs privilégiés de ce minier canadien pour ses projets en Afrique francophone. Les choses se sont ensuite faites naturellement. En huit ans, j’ai compris la manière dont Stéphane aime que les choses soient faites. Il m’a appris que la technique est essentielle, mais insuffisante. Quand s’entremêlent le droit des sociétés, le droit minier, voire le droit des successions, en plus des sensibilités locales, sur un dossier stratégique qui peut avoir un impact sur l’économie d’un État ou, a minima, sur les conditions de vie des communautés locales, la solution ne se trouve pas toujours dans les livres.

Stéphane Brabant : La sensibilité de Lucien m’a tout de suite sauté aux yeux. Doté d’une vive intelligence, il réagit avec perspicacité sur les dossiers. Je suis très rousseauiste car je crois en la bonté de l’être humain. Lorsque l’on tombe sur des gens possédant des qualités considérables, ou un certain talent sur le plan intellectuel ou humain, il faut les exploiter dans le cadre d’une dynamique commune. Au quotidien, nous essayons de ne regarder que le meilleur chez l’autre. Jusqu’à présent, cette manière de fonctionner nous a plutôt réussi.

Comment votre duo fonctionne-t-il au quotidien ?

S.B. : L’association de Lucien chez Trinity International, ne changera aucunement notre méthode de travail. Lucien est franco-libanais. Pour ma part, je suis français avec un père à moitié américain. Nous avons une culture et une approche différentes qui se complètent parfaitement dans le traitement des dossiers. Elles nous permettent de nous adapter à toutes les situations. La clef, pour un avocat international, est d’être à l’écoute, dans le respect d’autrui, et de ne pas hésiter à mettre l’autre en avant. C’est ce que j’ai toujours essayé de faire avec Lucien. Grâce à nos diversités culturelles, d’âges et d’expériences, je pense que notre duo présente toutes les qualités pour contribuer utilement au rayonnement de l’activité africaine du cabinet Trinity International.

L.B.C. : Nous avons une relation fondée sur le respect, mais il n’y a jamais eu de sentiment de hiérarchie. Nous avons toujours travaillé d’égal à égal et j’ai toujours su où était ma place. Je ne me suis jamais senti en back office en face des clients. Depuis le 1er jour, Stéphane me met en avant. Les clients savaient où s’arrêtaient mes compétences et quand Stéphane devait intervenir. J’étais autonome sur le traitement des dossiers et l’appelais lorsque j’avais des doutes ou un fort besoin de brainstormer.

S.B. : Nos clients attendent de notre part, une grande sensibilité des aspects culturels et d’éviter les contentieux. Nous y œuvrons au quotidien avec Lucien. Il est préférable de trouver un accord permettant la poursuite des projets. On s’enrichit mieux les uns les autres lorsque les projets aboutissent, plutôt que lorsque l’on se concentre sur quelques contentieux. Les projets, c’est du long terme, tant pour les populations que les États. C’est un cercle vertueux qui génère de la richesse et du bien-être pour tout le monde.

Avec Lucien, nous sommes avant tout des avocats de projets, mais aussi de crise.

L.B.C. : Nous avons toujours eu des idées complémentaires. Notre relation professionnelle est ponctuée de multiples débats depuis le 1er jour. Nous avons parfois des approches différentes et chacun essaie de convaincre l’autre. C’est une relation d’échanges. Tout le monde peut avoir une bonne idée. Le fait que Stéphane respecte les avis des autres, même s’ils ont moins d’expérience, et leur donne la chance de s’exprimer permet de trouver cette sorte d’autonomie. Les idées peuvent être variées tant qu’on poursuit le même but qui est l’intérêt du client. C’est un élément fondamental de ma formation à ses côtés que je transmets à mon tour aux juniors avec lesquels je travaille.

Comment cette nouvelle étape professionnelle s’est-elle imposée ?

S.B. : Mon association touchait à sa fin chez Herbert Smith Freehills. L’avocature étant une vocation à vie, il était évident que je souhaitais continuer à exercer. J’avais pensé, un temps, créer ma structure. Je me suis laissé séduire par le projet de Lucien, désireux de rejoindre une boutique internationale dédiée à notre cœur de métier et non un cabinet cross border centré sur l’Afrique. J’ai alors décidé de l’accompagner dans le cadre de cette nouvelle aventure professionnelle.

L.B.C. : Le bureau parisien du cabinet Trinity International, dédié aux projets d’énergies et d’infrastructures en Afrique et dans les autres pays émergents, a été ouvert en 2016 par l’ancien gidien Pierre Bernheim, fin connaisseur du secteur de l’énergie et des enjeux associés. En juin 2019, Marianna Sédéfian, en provenance de White & Case, est venue apporter son expertise en financement de projets en tant qu’associée. Avec Stéphane, nous disposons d’une expertise complémentaire. Notre savoir-faire en matière de projets et de transactions dans les industries extractives, notamment minière et pétrolière, complète la palette de services existante des bureaux de Paris, Londres, Washington et Singapour du cabinet, particulièrement en ce qui concerne les projets d’infrastructures en Afrique.

S.B. : De nombreux projets intégrés nécessitent le cumul de nos expertises. Pierre interviendra, par exemple, sur les aspects énergie et les concessions d’infrastructure, Marianna sur la documentation de financement, Lucien sur les conventions minières et j’aurai un rôle de supervision globale, de partage de savoir-faire et en matière de gestion de crises (contentieux et dossiers sensibles), ainsi qu’au regard des principes ESG (respect des droits Humains notamment).

Comment vous voyez-vous évoluer d’ici les cinq prochaines années ?

L.B.C. : Les clients avec lesquels nous avons travaillé toutes ces années cherchent une approche basée sur la technique juridique, mais aussi sur la sensibilité africaine de Stéphane qui permet de traiter des sujets très complexes. Il a une manière très respectueuse et appréciée d’approcher nos confrères sur le continent et la partie adverse, qui est souvent l’État. La connaissance intrinsèque du continent par Stéphane a conduit à ce que nous continuons à traiter certains dossiers avec Herbert Smith Freehills.

Succéder à Stéphane est particulièrement difficile. Ayant vécu et travaillé en Afrique pendant plusieurs années, il bénéficie d’une forte notoriété sur le continent. Cette partie est plus difficile à transmettre que la connaissance technique du traitement des dossiers, mais c’est une dimension qu’il a toujours eu à cœur de partager. Travailler à ses côtés et voir la manière dont il aborde les sujets m’a beaucoup appris et je m’en inspire au quotidien. La principale différence entre Stéphane et moi, d’ici les cinq prochaines années, est que je devrai faire mes preuves. Bénéficiant d’une forte notoriété, lui n’a plus rien à prouver à personne. En revanche, je devrai prouver, à moi-même, aux clients et aux associés du cabinet Trinity International que je suis digne de faire partie de cette aventure. Je dois montrer ce dont je suis capable et que je suis à la hauteur des attentes de tout le monde. Je sais aussi que ma force, et je souhaite me positionner là-dessus, est ma capacité à traiter des dossiers en arabe, ce qui répond aux enjeux soulevés par l’implication grandissante des acteurs du Moyen-Orient dans des projets sur le continent africain.

S.B. : Rappelons-nous de ce proverbe africain : « Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ». À deux, nous allions déjà vite, alors imaginez à quatre… Nous continuerons à aller encore plus loin. 

Lucien Bou Chaaya Stéphane Brabant Herbert Smith Freehills Trinity International