Connexion

« La gouvernance n’est pas seulement une règle, mais un état d’esprit »

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES
Paru dans La Lettre des Juristes d'Affaires n°1396 du 13 mai 2019

Insuffler la culture de la gouvernance au sein de toutes les entreprises, quelles que soient leur forme et leur taille, c’est ce que voudrait faire le Comité gouvernance d’entreprise, qui vient d’être créé au sein du Medef. L’organisation patronale souhaite promouvoir de bonnes pratiques en la matière au-delà du seul cercle des sociétés cotées. Les explications de Patrick Bertrand, président et de Carol Xueref, membre du comité.

Pourquoi avoir créé ce comité au sein du Medef ?

Patrick Bertrand : Il s’agit d’expliquer que la gouvernance, ce ne sont pas seulement des règles à suivre, mais c’est un véritable état d’esprit, qui transcende la forme et la taille des entreprises. La première phase a été d’établir un corpus de règles pour les sociétés cotées, ce que nous avons fait avec le code Afep-Medef, travail commencé en 1995 et en évolution permanente. Nous souhaitons désormais passer à l’étape supérieure.

Carol Xueref : En tant que membre, je viens apporter mon regard de praticien sur ces sujets sur lesquels j’ai été très impliquée lorsque j’étais secrétaire générale chez Essilor et désormais en tant qu’administratrice de sociétés cotées. Nous avons voulu aller au-delà du code Afep-Medef, être dans une démarche dynamique et montrer aux entreprises comment adapter les pratiques de la gouvernance à toutes les tailles et à toutes les formes d’entreprises.

Comment cette démarche peut-elle s’intégrer dans le quotidien des entreprises ?

Patrick Bertrand : On peut prendre en exemple les pratiques des grands fonds d’investissement, qui intègrent désormais une vigilance dans leurs process. Les sujets de gouvernance ne sont pas réservés aux seules grandes entreprises et aux sociétés cotées, c’est une préoccupation des entreprises au quotidien : dans les entreprises familiales, quand on se rend compte que l’endogamie n’est pas forcément un élément positif, dans une start-up, lorsqu’on a besoin de lever des fonds et de gagner la confiance des investisseurs, etc. Au-delà de toute dimension morale, il faut faire passer l’idée selon laquelle une société performante ne doit pas détruire son environnement, doit s’efforcer d’avoir des employés épanouis, et intégrer une logique d’organisation avec des contrepoids.

Carol Xueref : Le comité a vocation à diffuser des éléments de bonnes pratiques qui visent à inculquer aux entreprises la notion de confiance et de gouvernance, à faire comprendre aux entreprises cette notion de « confiance transparente ». Lorsque j’étais secrétaire générale, je disais toujours que je faisais de la médecine préventive, pas de la chirurgie esthétique. La gouvernance sert aussi à cela, à prévenir, afin que les entreprises ne passent pas leur temps à redresser leurs erreurs ou à régler leurs contentieux, ce qui n’est pas leur objet.

Quel sera le fonctionnement du comité ?

Patrick Bertrand : La composition du comité reflète ses ambitions puisqu’on retrouve parmi les membres des personnes de différentes générations, qui représentent toutes les tailles d’entreprises. Nous avons vocation à nous réunir tous les mois et demi environ pour travailler à la diffusion de bonnes pratiques, plutôt que de codes ou de documents plus formels. Nos travaux tourneront autour de 3 thématiques principales, à savoir les organes de gouvernance, les rapports entre la gouvernance et les parties prenantes (actionnaires, salariés, etc.) et la gouvernance et la vie des entreprises. Ce dernier thème s’attache plus particulièrement à identifier les évènements à l’occasion desquels avoir une bonne gouvernance ou s’adapter est important, à savoir dans les cas de transmission, de levée de fonds, de développement stratégique. Nous nous saisirons aussi de sujets d’actualité, comme par exemple l’exercice de la bonne gouvernance des actionnaires au sein des assemblées générales.

Carol Xueref : Le rôle de ce comité sera transversal et pratique, même s’il a vocation à proposer des révisions au code Afep-Medef ou à répondre à des projets formulés par le Parlement, ce qu’il vise, au fond, c’est la création d’une culture de la gouvernance.

Les membres du comité :

Patrick Bertrand, DG « opérations », Holnest ;

Dominique Ceolin, chairman of the board, ABC Arbitrage ;

Anne-Laure Constanza, fondatrice, Envie de Fraises ;

Dominique de La Garanderie, avocat ;

Laurent Fiard, cofondateur et PDG, Visiativ ;

Delphine Gieux, secrétaire du conseil, Schneider Electric ;

Sophie l’Hélias, administrateur Kering, présidente, Leader XXchange ;

Philippe Louis-Dreyfus, président, Louis-Deryfus Armateurs ;

Emmanuel Loulin, directeur général de l’éthique, délégué du président, L’Oréal

Olivier Millet, membre du directoire Eurazeo ;

Jean-Louis Petithuguenin, PDG, groupe Paprec ;

Fanny Picard, associée fondatrice, Alter Equity ;

Alain Pietrancosta, professeur, Ecole de droit de la Sorbonne ;

Carol Xueref, ancienne secrétaire générale d’Essilor, administratrice, Ipsen et Eiffage

3 à 4 membres supplémentaires devraient bientôt rejoindre le comité, selon le président.

MEDEF Olivier Millet Alain Pietrancosta AFEP-MEDEF LJA1396 Carol Xueref Patrick Bertrand Dominique Ceolin Anne-Laure Constanza Dominique de La Garanderie Laurent Fiard Delphine Gieux Sophie l’Hélias Philippe Louis-Dreyfus Emmanuel Loulin Jean-Louis Petithuguenin Fanny Picard