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« TousDroitsDevant est un espace ouvert où imaginer des solutions concrètes pour créer la grande famille du droit »

Par Ondine Delaunay
Paru dans La Lettre des Juristes d’Affaires, N° 1327 du 27 novembre 2017

Le 16 novembre dernier, l’AFJE et le Cercle Montesquieu organisaient le Grenelle du Droit. Un événement inédit qui a permis de rassembler les différentes professions du droit pour échanger sur l’avenir de la filière et la compétitivité du droit. Une première marche à l’édifice qui trouvera écho au travers d’un grand mouvement qui vient de naître : « TousDroitsDevant ». Explications de Stéphanie Fougou, présidente de l’AFJE.

Quel était l'objectif du Grenelle du droit ?

Cette initiative avait été annoncée à l’occasion des plateformes de propositions aux candidats présidentiels. Son objectif premier consistait à réunir toutes les professions du droit autour des thèmes majeurs tels que : fédérer nos professions, améliorer l’employabilité des professionnels, renforcer le droit comme outil majeur de la compétitivité des entreprises. Les profonds bouleversements que connaissent les professions juridiques, notamment avec le développement de l'intelligence artificielle, nous invitent en effet à réfléchir urgemment à l'avenir de notre filière tous ensemble. L'étude récemment publiée par EY, en partenariat avec l'AFJE et le Cercle Montesquieu, évalue à plus de 31 milliards d'euros le poids économique du droit dans l'économie française : notre industrie est donc dynamique et créatrice de valeur. A l'heure du Brexit, nous devons saisir l’opportunité de rendre encore plus atractive notre place de droit pour les investisseurs étrangers. Nous étions convaincus que le moment était donc venu de nous rassembler pour construire ensemble le monde juridique de demain. Energie, sympathie interprofessionnelle et création d’opportunités ont guidé notre démarche.

Comment s’est déroulé l’événement ?

Le Grenelle du droit n’était pas un colloque de plus sur l’avenir de la profession, mais un véritable moment de partage et de propositions collectives. Il a rassemblé environ 1000 personnes qui ont échangé durant toute la journée de manière constructive et vivante, loin de toute vision corporatiste. Les différentes professions du droit se sont unies avec la même ambition : faire progresser la pratique du droit et réfléchir aux métiers de demain. Nous savons que divisés, beaucoup seront durablement affaiblis, voire seront appelés à disparaître. Chaque atelier a permis un dialogue entre les intervenants et les professionnels présents dans la salle, à travers des interventions spontanées et un système de post-it facilitant la formulation de propositions concrètes. A la fin de la journée, a été présentée une liste de suggestions issues de chacun des ateliers et des pistes de réflexion à mener.

Quelles ont été les grandes propositions retenues ?

S’agissant de la fabrique du droit, il a notamment été proposé de réfléchir au temps parlementaire différemment, pour obtenir moins d’amendements et d’exposés politiques et limiter l’accroissement de l’inflation législatif ; de faire appel à plus de soft law, à plus de code de bonnes conduites pour une fabrique du droit différente ; d’attacher plus d’importance aux études d’impacts y compris des parlementaires, voire de créer un organe pour produire ces études d’impacts ; de développer une réflexion sur ce qu’est le droit à l’expérimentation, pour favoriser l’innovation ; mais aussi de faire participer les juges à la simplification de la loi, notamment au travers des arrêts de la Cour de cassation qui pourraient faire preuve de plus de pragmatisme. Sur la formation et l’employabilité, il a été examiné la possibilité de créer un tronc commun aux professions du droit, d’incorporer des majeures dans le socle commun correspondant à chaque profession, d’y enseigner la déontologie, d’introduire dans les formations des compétences extérieures au droit comme les soft skills (management, comptabilité, analyse financière, communication, langues), de créer l’obligation de formation continue identique à tous les métiers de la grande profession qui pourrait exister demain, de créer un diplôme dédié aux compétences d’entrepreneurial pour les juristes, mais aussi, dès l’université, d’imaginer des modules transverses pour faire travailler des économistes, des professionnels juridiques et des ingénieurs dans une grande école du droit. Enfin sur la compétitivité du droit, de notre système et de nos professions, il a notamment été proposé d’instaurer la confiance entre les professions pour une meilleure mise en œuvre du droit: créer une véritable filière juridique unique et unie, en cassant les silos, permettant d’apprendre à se connaître quels que soit les modes d’exercice afin de mieux créer, comprendre et appliquer le droit. Et plein d’autres idées.

Quelle suite est prévue ?

Une trentaine de personnalités1 du droit se sont joints à mon appel pour lancer le mouvement « TousDroitsDevant », une plateforme ouverte à tous les professionnels dans le prolongement du Grenelle, à partir de laquelle les ateliers pourront être prolongés et les échanges entre professionnels facilités. L’objectif : un espace ouvert où imaginer des solutions concrètes pour créer la grande famille du droit. Les participants à chaque atelier seront appelés à continuer à réfléchir sur les thèmes abordés, et formuler des propositions au Ministère de la Justice dans les mois qui viennent.









1 Stéphane Baller, Jacques Bouyssou, Thomas Baudesson, Pierre Berlioz, Dominique Borde, Hélène Bourbouloux, Guy Canivet, Jean Castelain, Pierre Charreton, Juliette Crouzet, Lise Damelet, Jean-Michel Darrois, Hervé Delannoy, Bruno Dondero, Romain Dupeyré, Fabienne Fagjenbaum, Florence G’Sell, Franck Gentin, Jean-Pierre Grandjean, Nicolas Guérin, Jean-Francois Guillemin, Kami Haeri, Aurélien Hamelle, Eleonore Hannezo, Xavier Hubert, Christophe Jamin, Benjamin Jean, Antonin Levy, Jean Messinessi, Claire Moléon, Nicolas Molfessis, Marc Mossé, Anne Outin-Adam, Marie-Aymée Peyron, Stéphane Puel, Denis Raynal, Georges Richelme, Bertand Savouré, Jean-Charles Savouré, Pierre Servan-Schreiber, Sophie Schiller, Daniel Tricot, Louis Vogel.





 
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