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Les dirigeants d’entreprise et la justice : peut mieux faire

Par Anne Portmann

Une importante étude menée par Kantar, à la demande de l’Institut Montaigne et du Club des juristes, éclaire pour la première fois sur le rapport des chefs d’entreprise à la justice et à l’institution judiciaire. Si ces derniers font confiance à la justice, ils considèrent que celle-ci manque de moyens et que le traitement des affaires judiciaires peut être amélioré, notamment en ayant recours à la médiation pour les petits litiges.

Quelque 78 % des dirigeants interrogés font confiance à la justice, même si l’on remarquera que les chefs d’entreprise notent mieux, de ce point de vue, l’inspection du travail, qui a la confiance de 86 % d’entre eux, ainsi que l’administration fiscale (82 % lui font confiance). Dans la continuité de ce résultat, il est surprenant de constater que 76 % des sondés estiment que c’est la justice administrative qui est la plus équitable, devant la justice commerciale et civile (72 % chacune). La justice prud’homale et pénale arrivent ensuite, respectivement créditées d’une cote de confiance de 68 et 67 %. Les magistrats sont perçus comme compétents (79 %) impartiaux (73 %) et l’institution comme indépendante (62 %). Le résultat est plus mitigé sur son pragmatisme, 50 % seulement des personnes estimant qu’elle prend en compte la réalité de la vie des affaires. Cette appréciation globale de la justice est différente lorsque l’on demande au panel son appréciation de l’institution en cas de décisions impliquant les entreprises : 54 % pensent qu’elles sont rendues dans la stricte application du droit et 57 % qu’elles sont influencées par des considérations extérieures. La politique arrive en tête de ces considérations, citée par 30 % des personnes interrogées, devant les médias et les considérations économiques. Ils sont aussi 18 % à estimer que les magistrats sont influencés par leurs préjugés sur telle ou telle entreprise.

Les chefs d’entreprise qui ont eu affaire à la justice, majoritairement prud’homale (56 %) - en général pour un litige les confrontant à un salarié ou à un ancien employé - ou commerciale (35 %) sont majoritairement satisfaits, même si en termes de taux de satisfaction, outre la justice prud’homale que 65 % des personnes apprécient, la justice civile (59 % de satisfaits) devance légèrement la justice commerciale (58 %). Le caractère consulaire de cette dernière est reconnu, par 79 % des sondés, comme étant adapté à la réalité des entreprises.

La durée de la procédure  : point d’achoppement

Lorsque l’on entre dans le détail des expériences auxquelles les dirigeants sont confrontés avec la justice, il est net que l’insatisfaction la plus importante concerne les questions de durée de traitement des affaires : 72 % en sont mécontents. Le coût des procédures, qui est la deuxième source d’insatisfaction, ne mécontente que 52 % des dirigeants. Dans cette configuration, lorsque l’on interroge le panel sur les pistes d’amélioration de la justice, 95 % citent le raccourcissement des délais de procédure. Vient ensuite la formation des juges aux réalités de l’entreprise (94 %), l’amélioration de l’information de celles-ci (90 %) et le renforcement de la dématérialisation des procédures (79 %). Les dirigeants plébiscitent le recours obligatoire à un médiateur pour les petits litiges dont l’intérêt est inférieur à 10 000 € (88 %) et se déclarent à 78 % favorables à la dématérialisation complète des procédures pour ces petits litiges. Quelque 87 % d’entre eux estiment que la justice devrait disposer de davantage de moyens, et 67 % considèrent que les parties devraient contribuer davantage aux frais.

Dirigeants Juristes d’affaires Club des juristes Institut Montaigne