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Cabinets d’avocats : de la firme au réseau

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES
Paru dans La Lettre des Juristes d'Affaires N°1342 du 19 mars 2018

Une étude réalisée par Legal Week dans 41 pays démontre que le modèle du cabinet international est délaissé par les directeurs juridiques qui lui préfèrent désormais les réseaux. En cause, notamment, le coût du recours à de telles structures, perçues de surcroît comme faisant passer le service au client au second plan.

«Je choisis mon avocat par rapport à sa réputation et à son expertise plutôt que par rapport au nom sur la plaque », témoigne le directeur juridique de l’entreprise new-yorkaise Pearson. L’étude, intitulée « Global legal services in a disruptive world » et sous-titrée « Big Law versus New Law » met en exergue la faiblesse majeure des cabinets multinationaux dans la perception qu’en ont les clients : les contraintes structurelles sont accentuées par les luttes intestines entre les bureaux des différents pays.

Les coûts de structure prennent le pas sur l’approche client

Les réseaux d’avocats, en revanche, connaissent une ascension rapide, même s’ils rencontrent des difficultés à obtenir des mandats pour des affaires internationales. L’étude américaine souligne également qu’il est important, vis-à-vis des directeurs juridiques, de jouer la carte de l’indépendance.

Les directeurs juridiques recherchent, encore et toujours, un fournisseur de services juridiques qui allie une haute qualité de services et qui combinerait ancrage local et empreinte internationale. L’étude indique qu’une « course d’armes géographique » existe pour offrir au client une plateforme globale lui permettant l’accès rapide et continu à un service juridique de qualité, où qu’il se trouve. Les directeurs juridiques estiment désormais que les réseaux, autrefois perçus comme des « clubs » très chers, deviennent des acteurs crédibles dans le marché des services juridiques. Ils sont même susceptibles d’avoir une chance de battre les « Goliaths » du droit que sont les firmes multinationales.

Quelque 77 % des personnes interrogées qualifient la prestation obtenue d’un cabinet en réseau de « bonne » ou « excellente ». Ils sont ainsi perçus comme ayant une approche davantage centrée sur le client qu’un cabinet international.

Le directeur juridique d’une entreprise américaine, Tangoe, raconte : « La seule fois où je me suis aventuré à faire appel à un important cabinet international, pour un conseil sur les données privées, c’était la pire expérience de ma vie depuis que je fais appel à des conseils extérieurs. Ils m’ont seulement donné un recueil d’observations de tous leurs bureaux locaux, sans aucun conseil pratique, m’ont adressé à un junior et ça m’a coûté une fortune », rapporte-t-il. Selon le sondage, 23 % des personnes interrogées estiment que le service fourni par un cabinet international est « inconsistant », contre 22 % qui l’estiment conséquent. La moitié des personnes sont « tout à fait d’accord » ou « d’accord » avec l’affirmation selon laquelle dans les cabinets internationaux, les questions d’infrastructure prennent le pas sur le service offert aux clients. Bref, des affirmations sans demie-mesure. À l'américaine. Mais une chose est sure : 66 % des directeurs juridiques interrogés estiment que la structure du cabinet externe consulté importe peu et ils privilégient la qualité du conseil donné.

Une présence internationale discutable

L’étude se penche également sur la réalité de la présence des cabinets internationaux dans le monde. La carte et l’infographie de l’étude démontrent que les grands cabinets « internationaux » justifient, pour 83 % d’entre eux, d’une présence aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Europe. En ce qui concerne l’effectif de ces cabinets, 38 % sont localisés aux États-Unis, la majorité de cabinets internationaux (55 %) ayant leur siège au Royaume-Uni. Seulement 23 % de l’effectif de ces cabinets est localisé en Europe continentale. L’hémisphère sud est cependant beaucoup moins bien loti. Seul 6 % de l’effectif des firmes internationales est présent dans l’Est asiatique, 4 % en Océanie, 2 % en Asie du Sud-est, au Moyen-Orient et en Amérique du Sud. L’Afrique fait figure de parent pauvre avec 1 % des effectifs.

La coopération dans les réseaux

Les clients semblent considérer que les luttes internes entre les équipes des différents desks minent le travail des cabinets internationaux. Ils préfèrent désormais l’efficacité du travail en réseau que fournissent les cabinets « boutique », réputés travailler mieux et plus vite, sans qu’une équipe ne tire la couverture à elle. Par ailleurs, la connaissance de l’environnement local à laquelle a accès un réseau qui dispose d’un maillage territorial est perçue comme un avantage. Près d’un quart des sondés (23 %) décrivent leur expérience de réseau comme excellente et 54 % comme bonne. Pour les associés des cabinets, le réseau présente l’avantage de la souplesse et permet de préserver l’indépendance et l’identité propre de la boutique. Cet avènement des réseaux, rendu possible par les progrès technologiques, en font une menace sérieuse pour les firmes internationales. C'est aussi la preuve que les choix stratégiques de certaines maisons, dont ceux de Gide, sont pertinents.

L’étude complète, en anglais, est téléchargeable gratuitement à cette adresse

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