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Cartographie européenne des directions juridiques

Par Aurélia Granel

La cartographie Legisway des directions juridiques vient de paraître. Menée par Wolters Kluwer et l’European Legal Tech Association (ELTA), cette enquête étudie l’état de la transformation numérique au sein des directions juridiques à travers l’Europe.

«L

es professionnels du droit reconnaissent la nécessité d’adopter des technologies juridiques, ainsi que les avantages qui en découlent. Pourtant, les résultats de notre enquête indiquent que les directions juridiques se situent encore à un stade relativement précoce de leur transformation digitale », souligne Sergio Liscia, vice-president & general manager of Legal Software Wolters Kluwer Legal & Regulatory. Trois facteurs majeurs caractérisent ce stade préliminaire du processus de digitalisation des directions juridiques européennes.

Dans un premier temps, l’étude constate que plus d’un quart des professionnels interrogés (27 %) n’ont pas de stratégie digitale définie, 14 % d’entre eux ont élaboré une stratégie digitale au cours de l’année dernière, tandis que 23 % l’ont fait dans les trois années précédentes. Actuellement, 17 % des directions juridiques sont en train de la forger. Pour 22 % des participants, la stratégie digitale de leur service ne suit pas de plan spécifique comportant des étapes ou dates clés. Lorsqu’elle est déjà en place, celle-ci mentionne ces étapes et dates clés à un horizon d’un an dans 38 % des cas. Seulement 1 % des directions juridiques possèdent un plan stratégique clair pour plus de 3 ans. Or l’élaboration d’une stratégie digitale à long terme est le point de départ de toute transformation digitale.

L’attribution d’un budget spécifique aux technologies juridiques revêt bien sûr une importance cruciale pour permettre de la mettre en œuvre. Or les dépenses technologiques ne constituent pas encore une part essentielle des centres de coûts des directions juridiques. Les difficultés rencontrées par ces dernières lors de l’introduction d’outils et services de technologie juridique sont majoritairement d’ordre financier, selon 57 % des répondants.

Questionnés sur l’allocation budgétaire destinée à l’acquisition d’outils numériques conçus spécifiquement pour les juristes d’entreprise, 38 % des sondés ont déclaré que ce budget n’était pas prévu. Ce pourcentage augmente à 43 % parmi les directions juridiques dont les dépenses annuelles dépassent les 100 000 €. Par ailleurs, 28 % des participants rapportent un budget inférieur à 10 000 €, tandis que 8 % mentionnent un budget supérieur à 50 000 €.

Enfin, la gestion du changement demeure un aspect important pour les répondants à l’enquête. Car introduire de nouveaux processus et outils au sein d’une équipe nécessite l’adhésion de tous les futurs utilisateurs, ainsi que celle des parties prenantes de l’ensemble de l’entreprise pour obtenir l’allocation du budget nécessaire. Quelque 49 % des directions juridiques interrogées considèrent l’adhésion des parties prenantes et des utilisateurs comme un défi majeur lorsqu’il s’agit d’introduire de nouvelles technologies juridiques.

Le cas français

Le cas des directions juridiques françaises est assez éloquent et reflète le manque de maturité des entreprises en la matière. Plus de la moitié d’entre elles n’ont pas encore établi de stratégie digitale à long terme, contre 44 % en Europe. Seulement 3 % de ces directions juridiques ont établi une stratégie numérique au cours des trois précédentes années, ce chiffre s’élevant à 23 % au niveau européen.

Les directions juridiques françaises identifient, à l’instar de leurs homologues européens, la garantie du budget comme l’un des principaux défis dans des proportions similaires (57 % au niveau européen et 56 % des directions juridiques françaises interrogées). Viennent ensuite la collaboration avec le service informatique à 76 %, l’obtention de l’accord des parties prenantes à 63 % et la réorganisation des processus et la variation importante de la charge de travail à 56 %.

L’adoption de ces nouveaux outils par les équipes représente également un défi (pour 56 %) en termes de réorganisation et de redéfinition des processus. L’amélioration des processus collaboratifs au cours des trois prochaines années est en première ligne des préoccupations des directions juridiques en Europe : 64 % des directions juridiques françaises ont déjà apporté des améliorations ou prévoient de le faire dans les trois prochaines années, et 74 % des départements juridiques européens. Par ailleurs, 42 % des directions juridiques françaises se sont saisies du sujet de la démonstration de valeur aux parties prenantes de l’entreprise en ayant déjà apporté des améliorations ou en le planifiant dans les trois prochaines années, (63 % des européennes).

Quels sont les facteurs les plus importants qui influencent la décision d’acquisition de technologies juridiques des directions juridiques françaises ? Celles-ci se démarquent de leurs pairs européens en étant plus nombreuses à accorder de l’importance à la formation et l’assistance (78 % en France contre 48 % en Europe), la flexibilité des méthodologies de déploiement (63 % en France contre 43 % en Europe) et le développement futur du produit (56 % en France contre 41 % en Europe).