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Anomia publie une étude sur les classements des cabinets d’avocats

Par Aurélia Granel

Publiée le 16 mai, l’étude d’Anomia sur les classements des cabinets d’avocats passe au peigne fin ceux qui sont réalisés par Décideurs, Option Droit & Affaires, le Monde du Droit, Le Point, Best Lawyers, Who’s Who, Chambers et Legal 500. Caroline Le, consultante en stratégie chez Anomia, dévoile, en exclusivité à la LJA, les contours de l’enquête.

Que retirez-vous de cette enquête ?

Environ 80 personnes ont été interrogées, durant le mois de mai, dans le cadre de l’enquête réalisée par Anomia, relative aux classements des cabinets d’avocats. Il s’agit essentiellement de salariés exerçant une fonction support en cabinet d’avocats, ou encore de leurs clients, d’étudiants, d’élèves-avocats et, bien évidemment, de personnes réalisant les classements. Notre étude relève un grand manque de transparence de tous les process utilisés par ces différentes sociétés. De manière générale, la plupart des sondés n’ont pas souhaité entrer dans le détail, c’est-à-dire s’épancher sur leur méthode, les critères de classement utilisés et l’importance de chacun, ainsi que sur l’analyse effectuée par la suite pour classer les cabinets d’avocats. Tous les classements prennent en compte le critère de la satisfaction client, de manière directe ou indirecte. Mais certains, comme celui du Point, sont réalisés à partir des votes des clients, sans entrer dans le détail de l’activité réelle du cabinet. Aucun entretien n’est réalisé avec les équipes. Or, comment vérifier si les votes sont bien effectués par de véritables clients et non des relations amicales ? Les avocats seront toujours favorisés par leurs références amicales, même s’ils n’ont pas été très performants sur un dossier. Et puis, objectivement, les cabinets devant mentionner des références ne donneront jamais le nom des clients avec lesquels ils ont eu une mauvaise expérience. Je doute également de la pertinence des classements payants, comme celui réalisé par Le Monde du Droit. Les classements Chambers et Legal 500 demandent aux cabinets d’avocats et à leurs clients un nombre d’informations beaucoup plus conséquent que leurs homologues français. Les cabinets sont incités à changer régulièrement de références, ce qui leur donne probablement plus de légitimité, car les meilleurs clients et les relations amicales ne sont pas les seuls interrogés. Ces classements sont-ils pour autant plus fiables que les autres ? Nous ne savons pas quels critères prédominent sur les autres concernant leur analyse et de nombreux éléments pourtant pertinents ne sont malheureusement pas pris en compte, notamment en ce qui concerne la marque employeur. Les classements Best Lawyers et Who’s Who prennent en compte les votes des pairs et/ou des clients ce qui peut être très biaisé. Et cette catégorie de classements ne récompense que les avocats, ce qui peut être bénéfique pour leur carrière, et non les cabinets. Or n’oublions pas que les structures gagneraient à faire parler d’elle comme entité et non en fonction de l’intuitu personae des avocats présents. Par ailleurs, soulignons parfois le manque de background juridique ou d’expérience des personnes effectuant les classements, notamment les entretiens avec les avocats et les clients, ainsi que les analyses des questionnaires en vue de les réaliser, qui peuvent rendre plus difficile une analyse fine des dossiers de candidature. Enfin, en raison de la confidentialité des dossiers, les informations relatives aux données fournies par les cabinets ne peuvent pas toujours être vérifiées. Par exemple, les données chiffrées et l’implication du cabinet sur un dossier pourraient être légèrement gonflées par les équipes.

Quelle est la valeur ajoutée de ces classements ?

La présence des cabinets dans ces classements participe à la stratégie de chacun d’entre eux. Leur pertinence dépendra de la stratégie menée par la structure, si elle est d’envergure nationale ou internationale. Notre étude démontre qu’il est important, pour la marque employeur des cabinets, d’être présents dans ces classements. Y participer demande toutefois un certain investissement, tant de la part des équipes de la communication, marketing et business development, que des avocats, qui doivent soumettre leur candidature et remplir de multiples questionnaires. Or, il est impossible de mesurer avec précision la valeur ajoutée de ces classements, le système ne permettant pas d’évaluer le retour sur investissement. Aucune donnée chiffrée ne permet de prouver qu’y participer accroît la clientèle. Ces classements ont finalement plus d’impacts sur les étudiants, les élèves-avocats et les jeunes collaborateurs, qui s’en serviront pour se positionner sur le cabinet où postuler. Pour les clients, les classements français ont d’ailleurs plutôt mauvaise réputation, contrairement à Chambers et Legal 500.

Quel serait le système de classement idéal ?

Notre étude a élaboré un système de référence, mélangeant les meilleures pratiques de tous les classements étudiés. Fondé sur un système de points, avec une méthodologie et une analyse totalement claire et transparente, ce classement comporterait différentes catégories pertinentes. Nous nous sommes en effet rendu compte que certaines spécialités ne pouvaient pas être comparées, ni même les cabinets de taille différente. Ensuite, les critères de classement doivent être élargis et ne pas porter que sur les dossiers. Ce classement comprendrait plusieurs volets, qui ne sont actuellement jamais pris en compte, comme la stratégie commerciale et de développement du cabinet, ainsi que la marque employeur, ce dernier incluant le bien-être au travail, c’est-à-dire l’ambiance, la rémunération et le management. La satisfaction client demeurerait un critère prépondérant, mais de véritables enquêtes et entretiens auprès des clients seraient instaurés, de manière à accroître la transparence. Enfin, ces classements pourraient être réalisés par toute personne ayant une bonne connaissance du marché, travaillant main dans la main avec des juristes pour la partie relative aux dossiers.