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Tests de personnalité : quels usages, quel intérêt ?

Par Anne Girard, seenago

L’usage des tests de personnalité est aujourd’hui largement répandu dans les grands groupes français et internationaux, mais aussi dans le secteur du conseil en stratégie et management, et plus récemment, des cabinets d’avocats.

Les tests de personnalité sont des outils permettant d’identifier les caractéristiques individuelles d’une personne dans les domaines de la relation aux autres, de la prise de décision, de la communication, de la gestion des émotions, etc. Bien utilisés, ils peuvent permettre à l’individu comme à l’organisation dans laquelle il travaille d’ajuster les aspirations du premier avec les attentes ou objectifs du second. Malheureusement, certaines utilisations maladroites ou même abusives, notamment en recrutement, ont éveillé un sentiment de méfiance parfois justifié.

Que vous souhaitiez recourir à un test de personnalité dans le cadre d’une démarche personnelle ou que vous vouliez mettre en place au sein de votre structure une initiative basée sur l’utilisation d’un test de personnalité, voici quelques lignes directrices à suivre afin d’en tirer un maximum de bénéfices pour vous-même et pour l’équipe, le cabinet ou l’entreprise.

I - Bien choisir son test (et le professionnel qui accompagnera le débriefing des résultats)
Le marché des tests de personnalité est hétérogène et le choix peut sembler difficile. Les 3 ou 4 cabinets leaders produisent des tests dont la qualité se vaut sensiblement. On se méfiera en revanche des (mauvaises) copies qui sont en général vendues à un moindre coût mais ne s’appuient pas sur une méthodologie et une éthique solides. D’autres paramètres sont également à prendre en compte, notamment l’accès sécurisé aux données – la plupart des cabinets qui vendent des tests proposent un accès internet de bonne qualité. Enfin, si la procédure de passation du test implique l’intervention d’un consultant externe, on vérifiera avec attention qu’il ou elle est bien certifié par le cabinet et que ses références sont réelles et crédibles.

II - Être clair sur l’objectif : développement ou sélection ?
L’utilisation d’un test de personnalité s’inscrit dans un processus ou dans un projet qu’il conviendra de préciser tant dans ses objectifs que dans le déroulement de sa mise en œuvre.


Dans le cadre d’une démarche de développement personnel, le test de personnalité peut être pertinent pour mieux se connaître et faire le point sur ses qualités managériales ou commerciales. Il faut cependant se garder de croire que le test de personnalité répond à la question « suis-je fait(e) pour être manager ? Suis-je bon commercial ? ». Les résultats du test de personnalité mettront en lumière les points forts et les points faibles ainsi que des pistes d'évolution pour améliorer ses capacités professionnelles. Il n’apporte donc pas de réponse binaire et ne peut être conçu comme un outil de prise de décision dans une carrière professionnelle.

On pourrait aussi vouloir formaliser et standardiser le processus de recrutement des juristes ou des avocats et y intégrer l’utilisation d’un test de personnalité. Il faudra alors clarifier exactement le but de cette utilisation : quel poids les résultats du test pèseront-ils dans la prise de décision ? Agiront-ils comme filtre ou simplement comme un élément d’information supplémentaire permettant d’affiner la connaissance du futur recruté ? Ces questions méritent d’être explicitement posées car le processus de recrutement est un exercice incertain et risqué qui engage la responsabilité de ceux qui décident. Certains recruteurs (réguliers ou occasionnels) pourraient donc être tentés de s’appuyer sur les résultats d’un test pour se couvrir ou pour éviter de choisir.


Autre exemple, un projet de développement professionnel au sein d’une équipe ou d’une structure, avec pour objectif de faire grandir les talents en orientant les collaborateurs vers des trajectoires ou des postes qui leur conviennent le mieux. Dans ce cas, le test de personnalité est utilisé non pas pour sélectionner mais pour mettre en phase les projets d’un individu avec les objectifs d’une organisation. Cet ajustement nécessite un dialogue ouvert, structuré et dépourvu de jugement, qui permette à chacun de réfléchir, à partir des résultats du test notamment, sur ses priorités, ses préférences et ses souhaits pour le présent et le futur, pour, ensuite, construire un plan de développement personnalisé. Ce type d’utilisation suppose bien entendu que les objectifs stratégiques du cabinet ou de l’entreprise soient clairs et qu’il existe une vraie volonté de développer la structure à partir des ressources humaines.

III - Oublier l’approche normative : il ne s’agit pas de « mettre les gens dans des cases »
Cette démarche doit donc nécessairement s’appuyer sur une approche non-normative. Il ne s’agit en effet pas d’évaluer le niveau d’une personne dans un domaine (par exemple, la communication) ou de lui démontrer qu’il ne sera jamais apte à exercer telle ou telle fonction. L’objectif est plutôt de lui apporter des informations permettant une meilleure connaissance d’elle-même. L’intérêt des tests de personnalité est d’apporter un support externe permettant d’explorer les différentes dimensions de la personnalité d’un individu avec sa coopération. Cette exploration, bien menée, peut renforcer la confiance en soi et donner des pistes de développement et d’amélioration.

IV - Prévoir un processus d’accompagnement rigoureux et bienveillant
L’utilisation d’un test de personnalité doit s’appuyer sur un processus d’information et de communication rigoureux. En premier lieu, chacun doit pouvoir comprendre le rôle du test dans la procédure ou le projet (cf. ci-dessus). Ensuite, il est important de communiquer sur le nom et les caractéristiques du test qui a été choisi (de façon à ce que les intéressés puissent s’informer sur celui-ci).

Enfin, le protocole suivi doit être clairement expliqué, en insistant sur les aspects liés à la confidentialité et aux usages du résultat. Ceux-ci doivent toujours faire l’objet d’un échange avec un professionnel qualifié. La qualité de cet échange est moins liée au test en lui-même (ou aux résultats obtenus) qu’à la façon dont l’entretien sera mené. Celui-ci n’est en effet pas anodin. Trop souvent, l’entretien de débriefing, lorsqu’il a lieu, se réduit à une reformulation plus ou moins fidèle du rapport standard sur les résultats, généré à l’issue du passage du test. Or, l’objectif devrait justement être de prolonger la réflexion avec la personne, en lien avec sa situation spécifique, dans un contexte d’écoute et de confiance mutuelle. Celui-ci n’est pas toujours aisé à obtenir et nécessite de prendre des précautions, de se donner du temps (parfois plus qu’on ne l’a prévu), et de porter attention au langage utilisé au cours des échanges. Les mots sont en effet souvent porteurs de significations différentes selon les personnes qui les prononcent et, mal utilisés, peuvent avoir un rôle dévastateur dans un exercice qui s’apparente finalement à un dévoilement de soi.