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Avocats : innover sans technologie ? C’est possible…

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES
Par Nathalie REHBY, Directrice générale, SATELLITIS

La révolution numérique a pris une telle place dans notre société, y compris dans le secteur juridique, que toute idée d’innovation est quasi automatiquement associée à une évolution ou une création technologique. Un avocat qui innove serait un avocat qui (s’)investit dans une legal startup, qui créée un logiciel ou une appli pour son cabinet ou ses clients, voire qui a un robot à ses côtés. Oui, mais n’y-a-t-il d’innovant que le numérique ? Et si l’innovation de ce métier était ailleurs ? Éléments de réponse.

Avocat, un métier qui change, donc qui innove

En effet, si le métier change –et il change !-, c’est bien que l’avocat s’adapte. Il innove donc pour rester conseil et défenseur de son client. Innover revient alors à être d’abord un avocat, complètement avocat sans rien oublier du métier, et à la pointe des nouvelles opportunités.

Retrouver les fondamentaux : Il est important de pas oublier qu’on est avocat (on fait du droit) avant tout. Or nombres d’entre eux oublient certains aspects pourtant clés de leur métier. Ceux qui au contraire les mettront en avant en tireront donc avantage. La première idée n’est pas nouvelle : Un avocat est expert surtout quand il se spécialise. Les mentions de spécialités restent ainsi une innovation.

Autre chose souvent délaissée. La Déontologie et le Secret sont des présupposés du métier eux aussi négligés. Cet avantage concurrentiel n’est pas exploité. Les juristes d’entreprises veulent la confidentialité des avis, l’avocat dispose depuis longtemps du secret (beaucoup plus étendu). Avocats, parlez-en !

Nouveaux domaines : autre axe à ne pas dédaigner, ce sont les nouveaux domaines de droit. L’évolution de la société, de l’économie, de la loi créée de nouveaux domaines de droit : l’environnement ou l’informatique puis internet ont été des « nouveaux » domaines. Les premiers qui y ont adhéré ont été gagnant. Les avocats doivent rester en veille sur les nouveautés et s’en emparer.

Nouvelles pratiques : Le métier évolue, la justice est en mutation, la procédure se dématérialise, les justiciables changent et attendent autre chose que du conflit, les institutions poussent à la déjudiciarisation… Le métier n’est plus seulement « du conseil et du contentieux ». Le conseil lui-même se diversifie (de l’anticipation à la crise), et les Modes amiables de règlement des différends sont bien là. Les avocats désirant rester compétitifs ne doivent négliger aucune méthode de négociation et de résolution de litiges, il est même très utile de se former à la médiation ou au collaboratif (pour le divorce sans juge par exemple). Et il y a encore l’acte d’avocat. De vraies nouveautés dans la pratique du métier.

Loi Macron : La loi Macron transforme le métier car elle décuple les possibilités offertes aux avocats : l’inter-professionnalité va permettre de créer de nouvelles structures, de nouveaux produits et de nouveaux métiers (Avocat Notaire, Avocat comptable…). Déjà la connexité et l’activité accessoire transforment la donne. Cela conduit les avocats à rester avocat, mais pas que !

Avocat augmenté, donc porteur de valeur ajoutée différente des autres avocats

Les avocats ne se sont mis que tardivement et très partiellement au marketing. Et souvent en réaction à partie de l’analyse clients. Aujourd’hui, comme dans d’autres secteurs d’ailleurs, c’est l’expérience client qui compte. Pour innover, l’avocat doit donc se rapprocher de son client et anticiper. Une veille régulière des clients ou des sujets clés est alors plus qu’utile !

« Penser clients » : La principale innovation que les avocats auront intérêt à s’approprier est de réfléchir à leur pratique en fonction des besoins de leurs clients. Les avocats doivent interroger leurs clients et être présents auprès d’eux. L’enquête de satisfaction est utile, ainsi que toute revue de dossiers, de contrats, de situations juridiques sut tel ou tel sujet.
Cela peut conduire à penser « secteur d’activité »: automobile, retail, start up, ETI, économie collaborative… et non en termes de droits (droit social, droit des sociétés, obligations, responsabilité…). Un cabinet de niche sur toutes les problématiques de la logistique ou de l’hôtellerie sera plus innovant et attractif pour un professionnel de ces secteurs que celui qui se présente comme faisant du droit des sociétés.

Pour connaître le client, l’avocat peut se pose des questions sur ses préoccupations nouvelles et sociétales comme la RSE, la vigilance, le nouveau dialogue social… Combien de cabinets d’avocats sont-ils, à se spécialiser RSE ? À Paris, à peine autant que les doigts d’une main, deux si on ajoute la province ! Alors que c’est désormais obligatoire pour les grandes et moyennes entreprises et collectivités, et que cela gagne les PME et TPE via le mécanisme de « parties prenantes », les avocats ne s’en emparent pas. Certains clament qu’ils conseillent leurs clients sur ce sujet, sans l’appliquer. Ce côté « faites ce que je dis, pas ce que je fais », déplait aux entreprises qui avec la RSE sont dans un « faisons ensemble, ce que nous disons et faisons concrètement ».

Les avocats seraient aussi inspirés de regarder du côté des opportunités offertes par les mandats et les certificats. Souvent, ces mentions, autre que la spécialisation et reconnus par les ordres et le CNB, sont très utiles et parlantes pour le client : Etre avocat ET … fiduciaire, lobbyiste, mandataire en transaction immobilière, mandataire sportif, intermédiaire en assurances, agent d’artiste, CIL (informatique et liberté), conseil et correspondant risques, intelligence économique et sécurité…

Demain (aujourd’hui ?), il y aura sans doute des avocats compliancer, des avocats Data Protection Officer (2 entreprises sur 3 comptent recruter un DPO pour se conformer au RGPD, la CNIL elle-même parle de 80000 DPO nécessaires), des avocats codeurs, et tant de métiers hybrides !

Alors innover, c’est possible. Qu’attendent les avocats ? Ces pistes ici proposées montrent qu’il suffit d’une bonne dose de bon sens et surtout de la curiosité sur les transformations de la société et de l’économie. Et puis ne pas hésiter à s’informer et se former !

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