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Séminaire d’associés : un temps pour l’analyse, le benchmark et le partage

Par <strong>Olivier Chaduteau - Day One</strong>

L'approche de l'été est toujours le moment dans les cabinets d’avocats pour penser, créer, lancer son séminaire interne de réflexion stratégique entre associés.


Le développement d'un cabinet d’avocats, à l’instar de tout autre cabinet de services professionnels (auditeurs, banquiers d'affaires, consultants, experts-comptables, investisseurs en capital, banquiers d'affaires,...), nécessite, a minima, la définition d'une stratégie et d’un positionnement, sa mise en place, son exécution et surtout, ce qui est encore trop peu fréquent, son suivi et la mesure de ses résultats.

La difficulté ne réside pas tant ici dans le fait de savoir ce qu'il faut faire, même si la définition de la stratégie doit résulter d'un processus précis et pensé, que de savoir comment il faut faire. Le véritable avantage concurrentiel sera pour le cabinet qui sait parfaitement exécuter ce qu’il a décidé, c’est-à-dire véritablement aligner son organisation, ses process, ses actions et ses budgets avec sa stratégie et son positionnement.


L'analyse annuelle


Aussi, faut-il sans cesse comprendre où le cabinet se situe en terme de performance, en se comparant pas seulement à ses propres performances passées, mais aussi par rapport au marché. Au-delà du suivi qu’il faut mettre en place, une analyse annuelle s'avère un événement crucial pour l’avenir du cabinet. Elle remplit un triple objectif fondamental :
- analyser les résultats du cabinet par rapport aux concurrents et au marché,
- évaluer la dimension humaine du cabinet,
- définir des objectifs de positionnement et de croissance, tant qualitatifs que quantitatifs.

Cette analyse permet tout d'abord de faire le point sur la situation du cabinet, d'évaluer la performance d'un point de vue quantitatif et chiffré :
- Quel est notre taux de croissance par rapport au marché ?
- La définition de notre marché et de notre positionnement doit-elle évoluer, changer ?
- Quelle est notre rentabilité ?
- Quels sont ses principaux clients (loi de Pareto des 80/20) ?
- Quel est le taux d'heures chargeables vs non chargeables ?
- Que faisons-nous durant nos heures non facturables ?
- Comment se répartissent nos revenus au niveau des différentes activités ?
- Comment a évolué la structure des coûts ?...


L'analyse de la performance est également qualitative :
- Comment la pyramide du cabinet a-t-elle évolué ?
- Quel est le niveau de fidélisation des clients ? de satisfaction ?
- Quelle est l'image du cabinet sur le marché ?
- Le cabinet a-t-il la crédibilité sur le marché pour lancer telle ou telle offre ?
- Comment les nouvelles technologies impactent-elles notre mode de fonctionnement et notre organisation ?...


Il ne faudra pas oublier aussi de réaliser une analyse sur les fonctions dites de supports (les secrétaires, l'informatique, les télécoms, le marketing, la formation, le recrutement...) afin de s'assurer s'ils sont en parfaite cohérence et alignement avec la stratégie voulue par la direction. Les résultats qualitatifs du cabinet constituent donc une analyse et une communication importantes lors d'un séminaire afin que chacun connaisse la position du cabinet par rapport à l'ensemble de ces données.


Se comparer aujourd'hui, anticiper demain

L'analyse du cabinet n'est pertinente que si elle se fait par rapport au reste du marché, aux concurrents et aux évolutions de l'environnement. En effet, communiquer une croissance de 5, 10 ou 15 % par exemple ne signifie rien ; il faut savoir, durant le même temps, comment a crû le marché afin de se comparer. Faire 5 % de croissance sur un marché atone est plus performant et motivant que de faire 15 % de croissance sur un marché qui en fait 50 %.


La comparaison (ou "benchmarking"), pratique très peu française culturellement, fait petit à petit son apparition dans les analyses stratégiques des cabinets.
En préparation, quelqu'un doit se charger de la collecte d'information sur le marché et sur la concurrence : 
- Quelle est la taille du marché ?
- Est-ce un marché mature ou encore en croissance ?
- Y a-t-il des nouveaux concurrents ou de nouvelles réglementations ?
- Quels sont les enjeux à venir ?
- Comment font nos concurrents sur tous ces sujets ?
- Comment font d’autres cabinets de services professionnels (consultants, architectes, auditeurs…) ?
- Un cabinet australien vient de s’introduire en bourse et lance déjà des opérations de croissance externe, qu’est-ce que cela signifie pour les cabinets français ? Vont-ils après les rachats des cabinets américains se faire racheter par des cabinets australiens qui pourraient lever tout l’argent nécessaire en faisant appel public à l’épargne ? Que se passera-t-il si d’autres pays dérèglementent aussi dans ce sens ?


La dimension humaine : sa culture, ses valeurs et ses compétences

La mise en place d'un séminaire stratégique pour prendre connaissance et échanger sur ces analyses se présente comme un très bon outil de partage et de motivation. Il permet de revenir sur les succès (et les échecs), de les analyser et de valoriser les responsables. Il donne aussi l'opportunité aux associés d'échanger de manière moins formelle. Attention toutefois à ce que les décisions qui sont prises soient suivies d'effet et que les avis de chacun soient au moins écoutés sinon entendus, sous peine d'obtenir un effet contraire.
Au-delà de la motivation, le séminaire renforce la culture du cabinet en créant du travail en commun, un vécu commun qui peut se transformer ensuite en valeurs communes. Il permet aussi de développer la connaissance de chacun sur l’ensemble des compétences du cabinet, facilitant du même coup la communication.
En effet, en travaillant ensemble lors du séminaire, les associés apprennent à connaître le métier de l'autre, si bien qu'ils renforcent leur connaissance de l'offre du cabinet et qu'ils peuvent, le cas échéant, identifier des opportunités de missions. C'est un moteur du cross selling ou de la transversalité.
C'est au cours du séminaire que les valeurs du cabinet doivent être réaffirmées et vécues le plus fortement.


Fixer les objectifs : partager, accepter et mesurer

Enfin, ce type d'analyse doit également permettre de préparer/établir la stratégie à venir du cabinet. L'importance de disposer en même temps de « toutes les têtes pensantes » est évidente. Le séminaire permet aux associés de partager et de définir chacun à leur niveau les objectifs du cabinet. Au-delà de l'objectif évident de développement du cabinet sur lequel chacun s'accorde, les objectifs divergent au gré des intérêts. Et il n’y a rien de moins constructif qu’un cabinet qui se comporte comme l’addition de plusieurs petits cabinets chacun autonome dans ses choix et ses directions. Une fois les objectifs qualitatifs fixés, les indicateurs de performance peuvent et doivent être mis en place et suivis par chaque responsable.

Le succès du séminaire dépend de nombreux facteurs et notamment de la préparation. A la fin du séminaire chacun doit repartir avec 2 ou 3 messages clés, dont le sentiment d'appartenance, et surtout une idée claire de là où le cabinet va et de ce que chacun, à son niveau, doit faire pour que le projet se transforme en succès. Car au final, tout se jouera dans la capacité à exécuter correctement la stratégie voulue et ce, à tous les échelons de la structure, c’est-à-dire par l’ensemble des hommes et des femmes qui la composent.