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Le CNB propose d’autoriser l’exercice libéral de l’avocat en entreprise

Par Miren Lartigue

Réunis en assemblée générale le 11 mars, les élus du Conseil national des barreaux (CNB) ont voté en faveur de l’envoi à la concertation de la profession d’un projet de modifications du R.I.N. visant à permettre l’exercice libéral de l’avocat au sein des entreprises. Le tout, en préservant son indépendance et en restant soumis à la déontologie de la profession et à la régulation par les Ordres.

Composé de membres du CNB, le groupe de travail “legal privilege-avocats et besoins des entreprises” avait pour mission « de trouver des solutions pour répondre au besoin de confidentialité des entreprises, précise Leila Hamzaoui, présidente de la commission Droit et entreprises, qui le pilote. Nous avons proposé des formes d’exercice qui permettent d’apporter le secret dans l’entreprise. » Parmi les différentes propositions du groupe de travail, la piste retenue par l’assemblée générale consiste à autoriser et encadrer l’exercice libéral de l’avocat au sein de l’entreprise de façon ponctuelle, dans le cadre d’un détachement, et de façon pérenne, en créant un domicile professionnel principal ou secondaire dans les locaux de l’entreprise. « Cela implique dans les deux cas une modification du R.I.N. pour que le cabinet puisse être situé dans l’entreprise, explique-t-elle. Et cela exige que les locaux soient conformes aux usages et permettent l’exercice professionnel dans le respect des principes essentiels de la profession. »

Selon le rapport du groupe de travail, pour être conformes les locaux devraient remplir les conditions actuelles du domicile professionnel, mais aussi bénéficier d’un réseau informatique disctinct de manière à garantir le secret professionnel et d’une adresse électronique séparée faisant mention de la qualité d’avocat. Dès lors, les règles concernant la déontologie, le secret professionnel, la gestion des conflits d’intérêts, les honoraires ou les perquisitions s’appliqueraient à l’identique.

En ce qui concerne les risques de requalification de la relation de travail (prêt de main d’œuvre illicite, salariat), « la situation est identique à celle de tous les prestataires de services, il faut pour cela prouver l’existence d’un lien de subordination, poursuit Leila Hamzaoui. Pour éviter cela, nous avons prévu d’établir des conventions-types incluant notamment des clauses de dédit lors de la rupture de la relation. Dans tous les cas, la requalification ne peut concerner le salariat puisque qu’un avocat ne peut être salarié que d’un autre avocat. »

Les quatre autres propositions soumises au vote de l’assemblée générale ont été écartées. Il s’agissait de la possibilité de distinguer le titre d’avocat de l’exercice de la profession en accordant ce titre à certains juristes d’entreprise sans les intégrer dans la profession mais en leur accordant le bénéfice secret professionnel ; d’autoriser certains juristes d’entreprise à s’inscrire au barreau sur une liste spéciale sans avoir le droit de porter le titre d’avocat mais en leur accordant le bénéfice secret professionnel ; de créer un statut spécial de juristes d’entreprise inscrits à un tableau tenu par le CNB et dont l’indépendance est garantie dans le Code du travail ; de créer un statut de juristes d’entreprise inscrits au tableau sous un volet B comme avocats mais avec le titre de “conseil juridique d’entreprise” (statut similaire à celui des juristes admitted to the Bar anglo-saxons). « La profession souhaite que l’exercice reste unique, observe Leila Hamzaoui, et les juristes ont toujours la possibilité d’accéder à la profession. Le groupe de travail a d’ailleurs décorrélé les deux questions, l’apport du secret dans l’entreprise et l’accès à la profession. »

Dans le cadre de la procédure de concertation préalable prévue pour l’adoption des décisions à caractère normatif, le CNB a transmis la proposition de modification de l’article 15 du R.I.N. (relatif au domicile professionnel) aux Ordres, syndicats professionnels et organismes techniques de la profession, qui ont jusqu’au 4 mai pour donner leur avis. Le projet sera ensuite à nouveau soumis au vote des élus de l’institution représentative de la profession au cours de l’assemblée générale les 20 et 21 mai prochains.


M.L.

 
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