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Comprendre notre cycle émotionnel en tant de crise

Par Stéphanie Bertacchini - Deinceps

Nous traversons actuellement une période de crise. Face à cette dernière, nos ressentis sont nombreux : certains sont en colère, d’autres sont tristes, nostalgiques, anxieux, d’autres encore sont soulagés, joyeux, en ébullition.  Subis ou souhaités, des changements s’en suivent. Ils nous bouleversent et nous déstabilisent. 

La courbe du changement apporte un éclairage intéressant pour comprendre les différentes phases par lesquelles nous passons en cette période de crise. 

Originellement, cette courbe est appelée courbe du deuil. Elle est inspirée des travaux d’Elisabeth Kübler-Ross, psychiatre helvético-américaine,  pionnière de l'approche des soins palliatifs pour les personnes en fin de vie. En étudiant le processus de deuil, cette dernière a constaté que les personnes en fin de vie passaient par plusieurs phases, sans qu’il y ait nécessairement de linéarité. Chaque individu navigue ainsi d’une étape à l'autre à son propre rythme, il en traverse certaines plus rapidement que d’autres et peut parfois rester bloquer dans l’une ou l’autre  de ces phases.  

Cette courbe s’applique également à toute période de crise et de changement, ces périodes comprenant en effet une phase de deuil : l’individu doit renoncer à un état antérieur.

La phase du déni

La première phase est celle du déni. Lorsque nous apprenons qu’un événement irréparable   se produit, de manière instinctive, une fois passé le choc, nous nous réfugions dans le déni : « Non, ça n’est pas possible, ça ne peut pas m’arriver, ça ne me concerne pas ». Nous refusons de prendre conscience de la disparition de l’état antérieur et évitons ainsi de ressentir de l’anxiété, du stress, de la peur.

Au sortir de cette phase la peur laisse place à la colère : nous commençons à prendre conscience de la modification imposée de notre existant et cela nous met en colère : « C’est injuste ; je ne comprends pas que cela m’arrive ; vous êtes des incapables ».

Une fois dépassée la colère, nous tentons de négocier avec les nouvelles données.  « D’accord, le système a évolué, voyons comment je pourrais m’y retrouver ».

Le risque lié à cette phase est de tout mettre en œuvre pour reproduire l’état antérieur : adopter un comportement hyperactif, déployer maintes stratégies pour revenir à ce que l’on connaissait sans prendre en compte la modification du système.

La phase du repli

La seconde phase est celle du repli. Elle s’accompagne d’une grande tristesse. Se sentant incapable d’évoluer avec les nouvelles composantes, l’individu se met en retrait. Le risque lié à cette phase est celui de l’isolement « ça ne vaut pas la peine ; je n’y arriverai pas ; c’est trop dur ».

La phase de l’acceptation

La troisième phase est celle de l’acceptation. Désormais, l’individu accepte de renoncer au passé et de se tourner vers le présent et l’avenir. Cette phase s’accompagne elle aussi d’une importante tristesse voire d’une nostalgie. C’est la fin d’un cycle, d’une période. Les risques liés à cette phase sont de deux ordres : la paralysie. « Je ne sais pas par où commencer » ; la fuite en avant « j’ai plein d’idées, je vais toutes les mettre en œuvre ».

La phase de la décision  

Vient ensuite la phase de la décision. Durant cette phase, l’énergie se renouvelle et de nombreux options apparaissent. Malgré l’énergie retrouvée, la peur reste présente : peur d’échouer, peur de réussir. L’individu tente, expérimente avant de prendre une décision, de s’arrêter sur un projet. Le risque lié à cette phase est celui de vouloir aller trop vite et de ne pas prendre le temps de construire et d’expérimenter.

Conscientiser ces différentes phases, prendre le temps de se situer sur cette courbe lorsque l’on a affaire à un changement – plus encore lorsque ce changement nous est imposé – permet de mieux comprendre les raisons pour lesquelles nous pouvons parfois résister, de se mettre dans une logique d’acteur et in fine d’évoluer avec plus de sérénité.

William Cargill deinceps