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Forum des avocates : la mixité en débats

Par Miren Lartigue
© Miren Lartigue


Le premier Forum des avocates s’est tenu à Paris le 1er décembre dans le cadre du Forum de la mixité. Des représentants de grands cabinets d’affaires y ont été invités à discuter des bonnes pratiques permettant aux femmes d’exercer dans les meilleures conditions et d'accéder aux postes à responsabilités.

Cinq grands témoins se sont exprimés : Valérie Lafarge-Sarkozy (De Gaulle Fleurance), Yves Wehrli (Clifford Chance), Nadège Nguyen (Gide), Catherine Joffroy (Dentons) et Stéphanie Auféril (Baker & McKenzie). Tous sont tombés d’accord sur le fait que « perdre un talent pour de mauvaises raisons, c’est problématique » et que faire bouger les choses implique la nécessaire prise en compte par le management des enjeux de la mixité et la mise en œuvre de mesures pour permettre aux femmes de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle. En ce qui concerne les enjeux, « les études montrent que plus il y a de femmes dans les instances dirigeantes et plus l’entreprise est performante, a rappelé Valérie Lafarge-Sarkozy. Cela est vrai pour les entreprises en général, et il n’y a pas de raison que cela ne soit pas vrai pour les cabinets d’avocats. » Quant à la volonté du management de faire bouger les choses, « cela ne suffit pas, a relevé Yves Wehrli, il faut également l’adhésion de l’ensemble des associés ».

Conseils de femmes

Quels conseils donner aux femmes pour faciliter la progression de leur carrière ? « Il faut croire en soi, travailler son réseau en interne, accepter d’avoir une carrière plus en dents de scie en raison des enfants et très bien s’organiser chez soi. Et le tout, sans culpabiliser, a énuméré Valérie Lafarge-Sarkozy, avant d'ajouter : C’est beaucoup moins fatigant de travailler que d’élever des enfants… »  « Il ne faut pas vouloir être trop parfaite, a pointé Stéphanie Auféril. Les femmes ont tendance à vouloir être trop parfaites pour tout. » « Il faut cultiver sa visibilité, notamment en interne, il faut faire le marketing de soi », a expliqué Nadège Nguyen. Et ce d’autant plus que les hommes conservent une longueur d’avance : « Les associés hommes se projettent plus naturellement dans un candidat masculin à l’association, a relevé Yves Wehrli. De plus, les femmes ne se déclarent pour un poste que quand elles se sentent prêtes, ce qui n’est pas toujours vrai de la part des hommes. » Quand elles se sentent prêtes, ou pour des raisons toutes autres : « Pendant un certain nombre d’années, je ne voulais pas être associée, a témoigné Catherine Joffroy. Ce qui m’a fait changer d’avis, c’est avant tout la possibilité de transmettre ma passion, et aussi de montrer l’exemple pour encourager les autres femmes. »

Reste que les politiques et les actions destinées spécifiquement à la promotion de la gente féminine peuvent nourrir chez les hommes un sentiment de favoritisme à l’égard des jeunes femmes. D’où la tendance à ouvrir ces programmes à tous, hommes et femmes. De même, le mentorat, plébiscité par les uns, ne fait pas l’unanimité : « La question du mentor ne me paraît pas essentielle, et certains grands cabinets estiment d’ailleurs que ceux qui arrivent à trouver leur voie seuls au sein du cabinet sauront aussi trouver leur voie sur le marché », a précisé Yves Wehrli.

Un autre monde ?

Dans l’assistance, Christiane Féral-Schuhl, ancien bâtonnier de Paris, a fait remarquer que la situation des femmes dans les grands cabinets d’affaires n’était pas représentative de celle de l’ensemble de la profession, et en particulier des femmes « qui n’ont pas les moyens financiers de s’organiser au quotidien, et notamment celles qui exercent en individuel ou à deux ». Ancien membre du conseil de l’Ordre de Paris et responsable de l’Observatoire de l’Egalité du barreau de Paris en 2012 et 2013, Michèle Brault a pour sa part dressé un tableau très noir de la vie des collaboratrices dans les grands cabinets, dénonçant « les retours difficiles de congés maternité », « le présentialisme forcené » et « les différences de rémunération entre collaborateurs hommes et femmes ».

M.L.

 
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