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Gérald Darmanin répond aux entreprises sur la fiscalité

Par Ondine Delaunay

Le 28 mai au matin, le Club des juristes a organisé un webinar, en partenariat avec August Debouzy, consacré au soutien au monde des entreprises et à l’économie face à la crise sanitaire. Sur invitation de Bernard Cazeneuve, associé d’August Debouzy et président du Cercle des juristes, et Martin Collet, professeur à Paris II, Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, s’est prêté au jeu des questions-réponses d’environ 300 auditeurs, pendant 1h30. Sans surprise, c’est l’après-crise qui a suscité la majorité des questions. À quoi les entreprises et leurs dirigeants doivent-ils s’attendre demain ? Une hausse de la fiscalité est-elle prévue ? Les réformes engagées – notamment celle sur l’impôt sur les sociétés – seront-elles maintenues ? Quid du traitement de la dette Française post-Covid ? 

Aucune hausse de fiscalité à l’horizon

« La mer va désormais se retirer et l’on va découvrir au fur et à mesure les dégâts qu’elle a causés ». C’est par cette image que le ministre a introduit son propos. Car la crise sanitaire a été inédite et la crise économique est, elle aussi, sans précédent. « Nous avons en quelque sorte nationalisé les salaires, a-t-il rappelé. Nous devons revenir dans un monde normal ». Et le ministre a été très clair : le budget de relance ne comporte pas de hausse de fiscalité. « Ce serait incohérent avec notre démarche et je ne considère pas que le moindre problème doit se régler par de l’impôt ». Il a également rassuré les auditeurs : les réformes débutées seront poursuivies, notamment celle sur la baise du taux d’impôt sur les sociétés et celles concernant les particuliers (ex. taxe d’habitation). « Nous pouvons réfléchir à d’autres solutions pour accompagner les entreprises comme l’accélération du remboursement de crédit pour l’année prochaine », a-t-il par ailleurs indiqué. Tout en accompagnant son propos de conditions, notamment celle de rembourser le prêt garanti par l’État dans un délai d’un an, ou d’augmenter les salaires.

Quant à une éventuelle baisse des impôts de production, il ne l’a d’abord pas écartée. Puis, revenant sur le sujet, il a détaillé les difficultés engendrées par une telle réforme. La contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) par exemple, qui représente un montant d’environ 4 Mds€, est versée à la sécurité sociale. Il semble bien sûr impossible aujourd’hui de baisser cette recette. Il a également rappelé que le tiers de cet impôt était payé par les banques et les assurances. « Ce n’est pas le moment de leur faire des cadeaux ! ». Une autre partie des impôts de production sont touchés par les collectivités locales. « Comment baisser leur financement au moment où elles sont chargées d’aider le tissu local à redémarrer ? », s’est interrogé le ministre.

Une plus grande participation des salariés

Une partie essentielle de l’intervention du ministre a été consacrée à l’épargne salariale. Alors que celui-ci a esquissé, il y a quelques jours, dans les pages du Journal du dimanche, l’idée de ressusciter « la grande idée gaulliste de la participation », il en a apporté quelques détails supplémentaires. Selon lui, elle est « une forme de nationalisation de l’entreprise tout en permettant à l’État de ne pas toujours intervenir dans l’économie ». Pas sûr que l’argument plaise aux chefs d’entreprise… Mais il ajoute que dans son idée, il faudrait généraliser la participation et l’intéressement des salariés, et supprimer la fiscalité correspondante. 

Les réflexions fiscales à l’échelle européenne

Rappelant que la France est favorable à trouver un accord entre pays européens sur une assiette commune de l’IS, le ministre a annoncé, avec une certaine confiance, que « d’ici la fin du quinquennat, on devrait parvenir à trouver un accord de non-dumping fiscal entre États ». 

Interrogé sur la question de l’avenir de la dette budgétaire de la France, le ministre s’est prononcé contre son annulation. « Ce serait une rupture de confiance très brutale qui aurait des conséquences immédiates sur les taux d’intérêt », a-t-il prévenu. Il a également écarté l’hypothèse de la transformer en dette perpétuelle tout en payant des taux d’intérêt chaque année aux banquiers. « Les Français se feraient avoir », a-t-il lancé sans langue de bois. Il a donc privilégié les options de renégocier la dette, et surtout de la mutualiser avec nos grands partenaires européens. « Il s’agit d’unir nos forces pour mieux discuter avec les marchés financiers, tout en veillant à ce que l’Euro garde son efficacité par rapport à d’autres monnaies comme la Livre ou le Dollar ».

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